Intermède musical

Lúa – Gasolina en la mochila

Je veux remplir les nuits d’activité
détruire les trottoirs de l’obscurité.
Courir et allumer l’aube
mon sac sur le dos et le visage caché
sentir l’espoir caresser mon dos.
Aujourd’hui j’ai une bombe de peinture , une bouteille,
et si la faim se fait sentir une pomme.

Sentir la peur tourner à chaque coin de rue
réveiller mes sentiments
crachant de l’adrénaline.
Rues ruisselantes de routine
où la pluie c’est le travail,
l’école, le mensonge.
Et de l’essence dans le sac
un monde nouveau dans le cœur
ton visage est caressé par ta cagoule et l’amour.

Je veux me cacher dans une ruelle
en pensant arriver chez moi
me reposer et rire, dormant avec la victoire
résister et espérer que tout se passe aussi bien que jusqu’à maintenant.
Et le jour où l’une de nous tombera
ne pas battre en retraite
nous ne pouvons pas pleurer
ou nos larmes éteindront la barricade.
Notre utopie c’est votre malheur
merci de ne pas prendre au sérieux nos mots
mais ne vous attendez à rien par la suite
il n’y a pas de cœur pour celui qui le vole avec une arme
je demande de ne rien demander, notre monde ne s’offre pas.

Sentir la peur tourner à chaque coin de rue
réveiller mes sentiments
crachant de l’adrénaline.
Rues ruisselantes de routine
où la pluie c’est le travail,
l’école, le mensonge.
Et de l’essence dans le sac
un monde nouveau dans le cœur
ton visage est caressé par ta cagoule et l’amour
et l’amour …

neska

Revendication de l’attaque sur le 21° commissariat

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Jeter une pierre, c’est un délit. Jeter mille pierres, c’est un acte politique. Mettre le feu à une voiture, c’est un délit. Mettre le feu à 100 voitures, c’est un acte politique. Protester revient à dire: « je suis en désaccord avec ceci et cela. »
Résister c’est dire: « Je vais mettre un terme à ceci et à cela ».
Ulrike Meinhof

Cette nuit le feu a une fois de plus étreint les bras insurgés pour la destruction de cette société misérable. Nous avons décidé cette fois de faire de la propagande, brûler une voiture c’est de la propagande, c’est dire que nous sommes là, que nous continuons sans peur, en souffrant mais jamais vaincus. Bien que pour nous brûler des voitures c’est de la propagande, c’est aussi une attaque directe là où ça leur fait le plus mal, la propriété privée. Dans ce foutu pays la propriété privée est plus importante que la vie humaine. Nous savons que la loi qui condamne Tamara Sol Farias est basée principalement sur le vol, le vol d’une arme. Sans y comprendre grand chose au domaine juridique, le vol en arrive à être un délit plus grave même que la tentative de tuer quelqu’un !

Même si cette fois nous savions que le facteur « bon citoyen » pourrait faire son apparition tel Robin des Bois, et ferait échouer nos désirs pyromanes et d’attaque, nous avons quand même pris le risque de se foutre d’eux et de leur montrer combien ils sont vulnérables face à beaucoup de volonté et un peu d’essence.

Que cette action soit une bouffée d’air pour les compagnon-ne-s séquestré-e-s en prison et un appel pour ceux qui sont dans la rue. Il vaut mieux une petite action que cent communiqués dépourvus d’action. Mot et action !

C’est là que nous sommes et que nous serons et nous n’oublierons jamais nos compagnon-ne-s tombé-e-s en luttant.

Que la dernière rafale de Angry explose dans tous les commissariats, Punky Mauri, Claudia Lopez, Matias Catrileo, Jony Cariqueo, sont toujours à nos côtés. Alpaca, Hermes, Hans, les prisonniers accusés d’avoir buté le flic Moyano, les prisonniers de la lutte de rue, José Miguel Sanchez qui va bientôt être relâché, et notre compagnonne Sol, tout ça c’est pour saluer ton courage et ta dignité.

Pour la propagation d’un été noir et d’une année encore plus noire.

Vive l’anarchie !

Les compagnon-ne-s pour la propagation du feu.

Contrainformate

C’est la faute aux anars

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« Écoute, je viens chanter pour ceux qui son tombés, je ne donne pas de noms ni d’indices, je ne dis que compagnons .. et je chante pour les autres, ceux qui sont vivants, et ont l’ennemi dans le viseur … »

Aux ami-e-s et compagnon-ne-s, connus et inconnus, qui embrassent les idées anarchistes, à ceux qui gardent la tête haute dans les prisons et ceux qui gardent vivante la lutte dans la rue. Une brève réflexion au sujet de la lutte anarchiste dans l’État espagnol.

Nous nous trouvons dans une situation politique et sociale curieuse. D’un côté ETA dépose les armes. Le GRAPO est désarticulé et le fondamentalisme islamique perd de sa présence médiatique dans cette partie du globe. Parallèlement la crise sociale liée à la soi-disant crise économique (et nous disons soi-disant parce que le capitalisme est en lui-même une crise constante et parce que pour ceux d’en bas c’est l’état perpétuel dans lequel nous nous trouvons) semble s’intensifier. De nouvelles éclosions de protestations et même d’émeutes apparaissent à différents endroits et milieux sociaux de la péninsule et l’État va se trouver sans un ennemi interne sur qui imputer les fautes, vu que le faire sur le « peuple », en faveur de qui tout le monde dit agir, ne semble pas être le plus approprié. Le fantasme anarchiste surgit alors, comme un diable interne sur le dos de qui l’on met tous les débordements des manifs, toutes les intensifications des luttes. Pour les désactiver l’État ne peut se permettre le luxe de réprimer brutalement la population ni d’insinuer que celle-ci a quelque chose à voir là-dedans. C’est pour cela qu’il doit isoler et calomnier toute tentative de rébellion, pour la rendre antipathique au commun des mortels, afin que ces épisodes et exemples ne se propagent pas. Ainsi depuis quelque temps ceux qu’il faut affronter, qui mènent les pauvres gens sur le chemin de la violence et de la déraison, et qui en plus posent des bombes et brûlent des églises, ce sont les anarchistes (ce qui n’est pas non plus faux). Un éther, quelque chose sans corps défini mais qu’on essai de structurer suffisamment pour qu’il puisse être catalogué comme groupe terroriste, mais pas au point qu’il lui reste en son sein un lueur de rébellion.

On a pu apprécier au cours de l’année dernière l’apparition récurrente dans la presse d’articles qui font référence à l’essor de l’activité violente anarchiste dans la péninsule. De comment la puissance et la fréquence des attaques ont augmenté, de comment sont financés depuis ici des milieux anarchistes à l’étranger et de comment des compagnons anarchistes italiens ou grecs viennent enseigner aux autochtones l’art de la guerre sociale, pour prendre quelques exemples. Les rapports publics des flics vont dans le même sens, mettant en garde de la dangerosité que les luttes anarchistes sont en train d’acquérir, en faisant l’une de leurs principales inquiétudes. Et même s’ils ont l’habitude de dire d’énumérables aberrations, avec l’intention de criminaliser et réprimer, c’est vrai que notre ambition est d’être leur pire menace. Mais de notre propre mérite. Nous connaissons bien le langage du Pouvoir. Ses doigts accusateurs nous pointent et nous ne sommes pas innocents. Nous ne voulons pas être innocents. Nous sommes anarchistes. Et en portant notre anarchisme nous voulons inspirer la passion, la solidarité et la révolte.

Le grand triomphe des idées anarchistes peut se comprendre lorsque nous voyons qu’elles n’ont jamais disparues malgré les efforts de tous les États, leur répression, l’emprisonnement, l’isolement et le harcèlement contre de nombreux compagnon-ne-s à travers le monde. Où que l’on cherche, il y a des compagnons anarchistes, les éléments agitateurs, les actions et tous les résultats concrets de la lutte contre le Pouvoir sont toujours là, fermes et intransigeants. L’erreur des appareils répressifs consiste à croire qu’un ordre judiciaire, les enquêtes policières tordues, l’emprisonnement de certains, les montages (c’est quoi leur justice si ce n’est un gros montage absurde), les conneries de la presse cherchant à maintenir son gagne pain basé sur le mensonge, serviront à vaincre l’idée et le combat pour la liberté, des chemins de lutte, le sens de nos vies, lorsque nous ne nous sommes jamais sentis esclaves. C’est l’idée même des anarchistes qu’ils ne pourront jamais récupérer ni racketter. Ça n’est pas possible d’en finir avec tout cela. C’est  précisément ce en quoi consiste la gêne que nous représentons pour le Pouvoir. Où que l’on cherche, nous le disons une fois de plus, se trouve la main tendu du compagnon, la solidarité vive, la complicité contre ce monde dégouttant, oppressif, carcéral, la certitude que notre potentiel est inépuisable. Nous n’admettons aucune autorité, nous ne recevons aucun ordre, le mercenaire juge, le mercenaire policier, le mercenaire journaliste sera demain substitué par un autre. Il ne détient rien de plus que l’ordre de maintenir cette fausse paix sociale, c’est sont boulot, ce sont des êtres pourris qui réaffirment ce système pourri, c’est là qu’ils sont, toujours en train d’essayer de faire leur devoir. Nous ne nous plaignons pas, nous savons comment tout cela fonctionne. Ce n’est donc pas compatible avec notre manière d’agir, le victimisme qui réclame moins de dureté, nous le laissons à ceux qui font confiance aux maîtres, à ceux qui sont à l’aise dans les petits espaces que cèdent la démocratie à la protestation dans son besoin de consensus. Nous ne sommes pas dissidents, pour l’être nous aurions dû d’abord adhérer ou soutenir le Système. Nous remettons en question tout ce qui compose chaque aspect de ce misérable monde, un chemin difficile et ardu mais satisfaisant et surtout un chemin que personne ne nous arrachera. Depuis 1906 où l’anarchiste Mateo Morral offrait un bouquet de fleur avec du nitrobenzène au cortège monarchique espagnol, jusqu’à nos jours, les choses ont changé mais nous sommes toujours debout. Nous nous solidarisons avec la compagnonne Sol, enfermée dans les prisons de l’État chilien, nous nous souvenons avec un amour acrate de Gabriel Pombo da Silva, Marco Camenisch, n’oublions jamais les compagnons morts en action Mauricio Morales, Lambros Foundas et Sebastián Oversluij, ni ceux mis en cause et poursuivis, et bien sûr, ces mots et la suite de la lutte vont aussi vers vous, Mónica Caballero et Francisco Solar.

Salut et Anarchie

Contrainfo

Clip vidéo du cd Furia y Candela

Ce cd est une initiative de compagnon-ne-s de la région bolivienne en soutien aux compagnon-ne-s séquestré-e-s par l’État.

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Réveille-toi, conspire.
N’aie pas peur tu es en guerre.
La terre se meurt,
libère-toi de cette merde.

Et les cachots brûlent.
Les murs tombent.
Ils ne peuvent pas nous contrôler.
Les murs tombent.

J’attends une nuit de plus,
que ça ne rate pas.
Le temps devient éternité
s’il n’y a pas d’attaque.

Solidaridad Negra

La réalité du virtuel

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«Plus ce monde devient invivable et plus son principe devient connaissable. Le concept de spectacle est encore plus intelligible qu’il y a vingts ans. Ce n’est donc pas seulement parmi ceux qui se trouvent rejetés à la périphérie de la société mais aussi bien parmi ceux qui se trouvent en son centre que pourra être formulé, plus explicitement qu’en 1968, le programme révolutionnaire : instaurer la communication sociale » (Os Cangaceiros n°3, La domestication informatique).

De nombreuses fois les accusations sur les raisons de notre foutue apathie pointent vers « internet », et sans plus de raisons concrètes on en fait la cause de la distanciation humaine, de l’exacerbation de l’image, etc … Mais nous devons nous rendre compte que les nouveautés technologiques sont développées par nécessité capitaliste et sont en étroite relation avec sa « mentalité », c’est à dire, avec la « mentalité » dominante. Internet développe et intensifie ce qui existe déjà, créant un cercle vicieux de rétro-alimentation. Le capitalisme développe internet et, à son tour, est conditionné par l’usage de cette nouvelle technologie.

Prenons l’exemple de la façon dont le Capital utilise et modèle en même temps l’isolement moderne dont souffrent de nombreuses personnes, comment il en tire profit et comment ça le renforce pour continuer de leur proposer sa marchandise : si toute la technologie de la communication (qui comprend les ordinateurs, téléphones et autres) rompt l’isolement comme on le prétend, et nous permet de communiquer chaque fois plus, ça n’est pas suspect que chaque jour on nous offre de nouvelles marchandises pour communiquer plus et mieux ? À qui pourrait-on vendre tout ça si ce n’est à des individus isolés qui ont besoin de se débarrasser, grâce à l’image de la communication, de leur solitude et l’angoisse qu’elle entraîne ? L’aliénation capitaliste qui remplaçait l’ « être » par l’ « avoir » s’est encore plus dégradée, passant de l’ « avoir » au « paraître », et quelle meilleure forme de « paraître », de feindre, qu’à travers un écran.

Nous savons que le capitalisme est une relation sociale, et dans cette relation sociale les conversations en dehors du mur de Facebook ne sont pas forcément plus intéressantes que les échanges qui ont lieu derrière l’écran. Internet n’est pas ce qui a ruiné les bonnes-vieilles capacités sociales que nous avions. Il n’y a pas d’un côté « Internet » et de l’autre « la vraie vie », malgré les clichés de ses détracteurs : Internet c’est aussi la vraie vie. Il y a un système de production et reproduction matérielle donné, qui n’est pas externe à lui, qui répond de fait à des besoins bien précis. Ceci étant précisé, nous pouvons continuer avec notre sujet …

«Néanmoins, ce n’est pas la technologie en soit qui dicte la nécessité d’une accélération vide; on peut très bien débrancher les machines ou les faire fonctionner plus lentement. En réalité, c’est le vide de l’espace-temps capitaliste séparé de la vie et sans liens culturels qui impose à la technologie une structure donnée et la transforme en mécanisme autonome de la société, impossible à débrancher. »(Robert Kurz, L’expropriation du temps).

Ceci est une publication relativement courte, et cependant, en ces temps de lecture en ligne elle peut être perçue comme très longue et ainsi il peut sembler difficile de se disposer à la lire. Au delà de notre capacité à écrire de façon agréable ou pas et de l’indifférence massive envers la critique radicale, il y a aussi l’impression qu’elle est longue même pour ceux qui pourraient avoir envie de la lire. En référence à la « critique sociale » notre époque se montre plus attirée par les images et les slogans courts qui se diffusent comme une plaie sur Facebook et d’autres espaces du web, des phrases brèves qui peuvent vaguement vouloir dire tout ou son contraire et qui ne permettent pas d’approfondir sur le sujet qu’elles prétendent aborder. La majorité des messages présentés dans les nouveaux supports technologiques donnent la priorité à la rapidité et la superficialité face à la possibilité de pouvoir partager des idées complètes et précises. Dans ce sens, une affiche ou un tag avec un slogan simple pourraient être mis dans le même sac, cependant, un tag anticlérical sur une église a beaucoup plus de force que mis dans l’espace vide du web. De même, une phrase esthétiquement « combative », courte, abstraite et décontextualisée lancée sur le net peut tomber à pic et être « partagée » autant par un amoureux qui sent qu’il doit « lutter pour son amour », que par un arriviste qui sent qu’il doit « lutter pour un poste plus élevé dans l’entreprise » ou par quelqu’un qui se considère comme une personne combative en étant maoïste, écologiste ou peronniste.

En même temps, cette réduction de concepts alterne avec une surcharge de stimulations peu ou mal digérées qui rendent impuissant son spectateur : des images sans censure d’un massacre ou d’animaux disséqués, des soi-disant recherches de réponses dans des dizaines de livre téléchargés qui ne seront jamais lus et des articles de Wikipédia qui font passer d’un lien à l’autre sans réussir à en finir la lecture. L’impact de l’horreur sans réflexion accable et paralyse, même dans l’apparence du « mouvement ». Et bien plus encore, dans l’espoir qu’une prise de conscience plus ou moins généralisée soit suffisante pour transformer la réalité, une adhésion « cérébrale » à telle ou telle chose.

« La saturation de l’audience face à la multitude de « vérités gênantes » qui ne gênent déjà plus personne, pourrait répondre à la « surconscience » qui, à force de stimulation, est devenue impuissante. La surexposition à une quantité énorme d’informations a lieu au moment où la moindre référence sur le fait de trier l’information est immédiatement réfutée et jetée à la poubelle des idées dépassée ; d’où n’importe quel imbécile l’en sortira un jour pour les vendre une fois vidée de contenu (dans sa langue : une fois actualisée). Ainsi de nombreuses personnes qui veulent une transformation des conditions actuelles de vie ont cru que, en utilisant dans d’autres buts les moyens technologiques, la dite révolution d’information pourrait être orientée vers des objectifs plus hauts. Mais le problème de fond est, en réalité, que très peu croient déjà en ces beaux objectifs, parce que c’est précisément le système technologique dans on ensemble, et pas l’utilisation de la technologie ou cet outil séparé, qui a sapé les bases matérielles nécessaires à une vie relativement autonome et une conscience qui tend vers la liberté de pensée» (revue Cul de sac n°2, Gravats).

Le consommateur d’internet, dans l’illusion de la participation, aime se considérer comme « utilisateur » dont la définition dans le dictionnaire est « celui qui utilise quelque chose de façon ordinaire, qui a le droit d’utiliser une chose d’autrui avec une certaine limitation ». Une définition de qui est suffisamment précise pour décrire ceux qui sont consommateurs de certaines technologies même s’ils se considèrent comme « utilisateurs », ce qui leur faire penser à la neutralité des nouvelles et vieilles technologies, dans la possibilité de les utiliser selon sa morale, chose qu’un simple consommateur ne pourrait pas faire … et nous voyons qu’un utilisateur non plus.

 La promesse d’interactivité est l’un des points forts dans la promotion d’internet. Analogue à l’idée de participation dans la promotion de la politiques, ce ne sont pas totalement des mensonges mais des moitiés de vérités. On peut participer, même jusqu’à « créer », mais dans le cadre des règles prédéterminées par la structure sociale qui invite à cette participation. C’est à dire, on peut faire et produire en fonction des objectifs préétablis qui ont été décidés sans nous. Sans aucune gêne on nous invite à collaborer au processus d’oppression même.

 En ces temps, le consommateur moyen d’internet est simplement un consommateur de « réseaux sociaux » et, dans ce cadre, tout comme il peut réussir à avoir des centaines d’amis il peut aussi se joindre à une infinité de causes. Mais en dehors du support virtuel il se rendra compte que c’est impossible de maintenir une relation d’amitié avec des centaines de personnes, tout comme c’est impossible de se joindre à une si grande quantité de causes aussi diverses, vu que les heures d’une journée ne lui suffiront pas et son mental ne le supporterait pas non plus. Autant l’amitié que la participation à certaines causes ont besoin de liens forts et profonds, autant  les plateformes des réseaux sociaux,  au contraire, se construisent autour de liens faibles.

Pour la lutte qui nous semble nécessaire actuellement il faut, nous le disons sans détour, du dévouement, de l’engagement, de la constance, des efforts et renoncer à une certaine normalité.

« C’est le type d’engagement qui peut entraîner le rejet social et les difficultés dans le travail. Beaucoup abandonnent. Créer un groupe facebook en faveur ou contre quelque chose est au contraire très facile. Et c’est toujours plus facile de déplacer le curseur sur le bouton correspondant pour donner notre soutien, depuis le confort et la sécurité de nos maisons ou postes de travail. Ça ne devrait pas paraître bizarre que les groupes d’initiatives politiques sur facebook ont autant de suiveurs ? Comment ils font pour qu’autant de personnes soutiennent leur campagne ? Simplement sans trop leur en demander. C’est la seule façon d’obtenir que quelqu’un que tu ne connais pas fasse quelque chose pour toi. Mais ça n’implique aucun risque économique ni personnel, ça ne ne veut pas dire que tu vas passer un été poursuivi par des hommes armés dans des jeep. Ça ne nécessite pas que tu affrontes des normes et pratiques socialement bien établies. De fait, c’est le genre d’engagement qui ne t’apportera que reconnaissance sociale et éloge. En d’autres termes, l’activisme de facebook mène à la réussite sans motiver les gens à ce qu’ils fassent un réel sacrifice mais en les motivant à faire les choses qu’ils font lorsqu’ils ne sont pas suffisamment motivés pour se sacrifier réellement » (revue Cul de sac n°2).

Ce que nous essayons de mettre en avant c’est que si la « cyber militance » existe, elle ne vient pas corrompre une militance réelle, mais elle apparaît lorsque cette militance est en déclin ou disparue.

Le manque de perspective internationaliste rend cette réalité évidente. Le prolétariat n’est pas plus internationaliste grâce à internet et ses énumérables forums mondiaux, sites web de contre-information, etc. Des décennies auparavant, des manifestations mondiales comme celles en soutien à Sacco et Vanzetti, les événements de Chicago, la Première Internationale, le fait d’assumer comme sien dans diverses régions le développement révolutionnaire en Russie et en Espagne, démontrent que le prolétariat communiquait, voyageait, était solidaire et était en coordination sans les technologies actuelles. Simplement nous ne pouvons pas accuser ces technologies du manque d’internationalisme, ni espérer que de nouveaux moyens de communication rendent possible, facilitent ou même résolvent cette nécessité historique du prolétariat. Même l’excès d’ « information », sa démocratisation sur le net où on dirait que tout devrait nous importer de la même façon, les milliers de commentaires, avis, verbosités ; aident à paralyser, à courir les axes de discussion, et de plus laissent libre court à la confusion, à la tergiversation des faits, aux fausses informations.

Après avoir lu ces critiques on pourrait lire entre les lignes une demande à abandonner l’usage de Facebook, Twitter, etc … ce qui pourrait être salutaire, mais le nombre d’individus « surconscients » ne donne pas les résultats attendus ni sur Facebook ni dans la rue. Pire même, on n’a jamais vu dans l’histoire de changements de conscience générale ayant pour origine la simple répétition de  propagande (virtuelle ou sur papier) lancée indifféremment.
L’engagement se fait rare, l’isolement est égal ou pire qu’avant, les relations humaines sont toujours en décomposition et la réappropriation théorique est pauvre sans parler de sa réalisation.

Malheureusement, nous ne faisons que mettre en évidence ce que nous devons combattre, ces particularités en rapport avec les « réseaux sociaux » ne se modifieront pas tant que la situation qui les contient ne changera pas. Et tant que le conformisme et l’apathie existeront, cet optimisme technologique se déplacera d’une machine à une autre. Dans la compulsion technologique chaque nouveauté est désirée pour sa qualité de nouveauté, et ce qui est vieux est jeté à la poubelle de l’histoire capitaliste, que ça date de l’année dernière ou de quelques décennies avant. À son tour, chaque nouveauté technologique vient généralement accompagnée d’un discours de libération, de bien-être. Et le cas d’internet, pour sa soi-disant plus grande accessibilité et facilité d’utilisation est plus encourageant que ce que n’avaient pu l’être, en leurs temps, les débuts de l’imprimerie ou de la radio. En supposant que « tout le monde » (ce qui est un mensonge) peut s’exprimer, communiquer, créer des sites web, choisir l’information qu’on va consommer, etc… Nous devons nous demander à quel prix tout cela se fait et ne pas oublier qu’il ne s’agit pas d’un élément isolé du reste de la société capitaliste. Nous devons dévoiler ce qui se tait jalousement, et cela remet inévitablement en doute que ce genre de technologies pourraient être maintenues en dehors du système capitaliste : sans division internationale du travail il n’y a pas d’ordinateurs ni d’internet comme nous les connaissons. Faire abstraction de la matérialité des supports physiques d’internet c’est éviter de reconnaître l’obtention des matières nécessaires, leur production, leur distribution et leurs déchets inévitables. Le cyberespace pour beaucoup de technophiles revêt la fonction de paradis religieux, ce qui n’est rien de plus que la projection d’une image de la terre dépurée de ses contradictions. De nouveau, un « lieu » sans espace physique dans lequel peuvent se lancer les fantaisies les plus insensées. On suppose que la jouissance et l’empathie, et même des raisons égoïstes, motivent les gens à partager, à créer une sorte de « communauté » d’utilisateurs, où chaque individu prend du réseau beaucoup plus que ce qu’il pourrait donner. Ce sur quoi on pourrait réfléchir pour en connaître les nuances. Cependant, dans la bêtise totale on en est arrivé à faire référence à cela comme « anarcho-communisme » :

«L’économie du don et le secteur commercial ne peuvent se développer qu’en s’associant au sein du cyberespace. Le libre échange de l’information entre les utilisateurs s’appuie sur la production capitaliste d’ordinateurs, de logiciels et de télécommunications. ( …) Au sein de l’économie mixte numérique, l’anarcho-communisme vit aussi en symbiose avec l’État. (…) Dans l’économie mixte du Net, l’anarcho-communisme est devenu une réalité quotidienne. » (Richard Barbrook, L’économie du don hightech).

Ce à quoi Mandosio répond :

« Une fois que la main invisible est là pour faire que coïncident comme par magie les intérêts égoïstes et la prospérité publique, et comme première résolution de toutes les contradictions de notre monde tristement matériel : le capitalisme et l’économie du don se stimulent mutuellement, l’ « anarcho-communisme » et l’État travaillent de concert … c’est formidable, et c’est d’autant plus remarquable parce qu’il ne s’agit pas, comme dans le christianisme ou les utopies classiques, d’une vision de l’avenir, mais d’un discours qui prétend décrire une réalité déjà existante ; ce pays de cocagne, il suffit de se connecter pour y vivre éternellement d’amour et d’eau fraîche. Les « anarcho-communistes » qui propagent cette idéologie rendent un grand service aux promoteurs étatiques et industriels d’internet, car c’est précisément en présentant internet comme ce nouveau « pays des merveilles » où tout est gratuit, que se crée chez les gens le besoin de s’équiper en matériel informatique nécessaire pour se connecter, comptant sur le fait qu’une fois devenus accros on ne les lâchera plus ».

La rapidité et la simplicité des nouvelles technologies de communication est en réalité un enchevêtrement lent et complet de spécialistes et intermédiaires, d’exploitation et de mort, qui reste obscure à travers le téléphone, l’ordinateur ou la nouvelle babiole sophistiquée. En fin de compte, comme toute marchandise, elle cache son mode de production et la façon dont elle se met en circulation, même si contrairement aux autres marchandises elles supposent une dépendance supérieure de quantité d’intermédiaires, spécialistes et spécialistes plus sophistiqués.

Avec ces graves problèmes sociaux, qui n’intéressent pas vraiment le citoyen lambda prisonnier des ces produits, nous pouvons dire que cette multitude de supports promettent la capacité de réaliser une quantité de tâches différentes, pendant que de nouveau elles cachent que, en général, elles n’ont qu’un seul usage : la reproduction du système qui les a rendu possible. Ce qui n’empêche pas de dormir le citoyen lambda, et peut-être que l’impact « individuel, qui est naturel et immédiatement un problème social, ne l’empêche pas non plus de dormir .

Paradoxalement, ou pas, nous avons trouvé sur le net un article intitulé Google nous rend stupide ?, où son auteur Nicholas Carr, bien qu’il reconnaisse que le travail de recherche qui avant lui demandait des journées entières immergé dans des bibliothèques peut se faire maintenant en quelques minutes en cherchant sur google, confesse : «me plonger dans un livre ou un long article était avant une chose facile, (…) parfois j’étais un plongeur qui s’immergeait dans des océans de mots. Aujourd’hui je survole au raz ses eaux comme un scooter des mers».

C’est que les médias ne sont pas des canaux neutres où s’écoule l’information, mais ils configurent le processus de pensée. Ça n’est pas facile de rester concentré entre les pubs, plus d’un onglet ouvert et un lien qui amène à d’autres sites et ne permet pas de finir le texte (à la différence, par exemple, d’une note de bas de page qui permet de suivre le rythme du texte). Lorsque le regard bouge rapidement du coin en haut à gauche au coin en bas à droite d’un article du web, ce qui s’appelle la lecture diagonale, il est impossible d’envisager de lire tranquillement. Lorsque l’on peut trouver immédiatement l’information à travers des moteurs de recherche comme Google, on a tendance à oublier l’information obtenue. Dans la « vie réelle » les conversations sont interrompues en permanence par les téléphones qui sont supposés nous faire communiquer en obstruant la communication.

Ce que le Capital touche il le transforme en une chose sujette à la valeur, lui imposant ses lois de production. Carr signale que pour Google «l’information est une sorte de matière première, une ressource utilitariste qui peut s’exploiter et se traiter avec une efficacité industrielle, et plus il y a de fragments d’information auxquels nous pouvons accéder et plus vite nous pouvons extraire son essence, plus nous serons productifs comme penseurs». La quantité avant la qualité, la concurrence et le besoin de transformer chaque activité humaine en activité sujette au Capital sont les intérêts de cette compagnie, tout comme ceux des autres. Me si elle se présente comme un modèle de travail heureux et créatif, « le modèle Google » au fond n’est pas plus qu’une « vieille » usine nocive et morne.

La connaissance, l’intelligence, la créativité ou le raisonnement ne devraient pas être le produit d’un processus mécanique, une série de tâches séparées qui peuvent être mesurées et optimisées selon les critères de la valorisation du Capital.

Ces marchands de données, qui est ce à quoi ils ont réduit notre communication, connaissances, etc, ont assumé l’affirmation qui rabâche que « l’activité cérébrale » est isolée de celle du reste du corps. Ce qui d’une certaine manière amène à assimiler le concept « d’activité cérébrale » à une activité mécanique. Ainsi la notion dominante d’intelligence est en rapport avec sa quantification, en plus d’une forme d’individualisation où un coefficient indiqué par un test est une donnée de plus de l’humain avec un numéro d’identification, et où l’on ne considère pas « l’intelligence » en groupe à moins que cela ne serve pour des travaux concrets et où tous ceux qui vont être classifiés suivent le critère du classificateur.

Dans la même logique, notre époque considère que le cerveau humain est similaire à un ordinateur. Et bien sûr comme celui-ci est déjà obsolète nous avons besoin d’appareillages : un disque dur avec une plus grande capacité et un processeur plus rapide, intelligence artificielle indispensable pour suivre ce rythme de vie, qui est peut-être très bien mais pourquoi devrait-on suivre ce « rythme de vie « ? Pourquoi utiliser des outils qui atrophient la partie du corps qu’ils prétendent amplifier ? Pourquoi déléguer notre mémoire à un objet ? La « mémoire » d’un disque dur ne mémorise pas, nous ne faisons que stocker et ranger des données en elle, mais elle n’a pas de volonté même si elle « pense ». À la gare ou à la banque on peut nous dire qu’il y a eu « une faille dans le système » comme si personne n’était responsable, mais toute délégation, même technologique, est de notre propre responsabilité.

« Si quelques décennies ont suffi pour que les ordinateurs et autres robots n’apparaissent plus comme d’inquiétants automates et deviennent les compagnons ordinaires de la vie quotidienne, c’est parce qu’au préalable les relations sociales ont été systématiquement désintégrées. Pourquoi préfère-t-on faire ses courses, acheter des billets de train ou consulter son compte bancaire par internet sans sortir de chez soi ? Parce qu’aller dans un supermarché, une gare ou une banque est une expérience qui n’a rien d’agréable, et parce que la personne que l’on a en face dans un supermarché, une gare ou une banque n’est déjà pas plus qu’un automate humanoïde. On en arrive alors à préférer la froideur de la relation avec une machine à la froideur des relations humaines. Et, par manque d’amis humains dans une société où les individus sont chaque fois plus séparés et où l’autre n’est perçu que comme une entité menaçante, les ordinateurs qui cohabitent plus avec nous que dans le passé deviennent des « amis » de substitution (…) Le cas d’internet est analogue à celui du téléphone portable ou des animaux de compagnie électroniques. Il s’agit seulement de satisfaire un désir élémentaire de relations affectives et de communication en mettant à distance les autres humains (avec qui l’on est en rapport permanent, mais toujours indirecte, via téléphone ou internet) ou en les supprimant» (Jean-Marc Mandosio, Le conditionnement néotechnologique).

Alors quoi ? Après ces critiques on devient tous technophobes ou primitivistes ? Si l’on en vient à réfléchir à une issue individuelle de ce problème, où l’identification idéologique à tel ou tel courant serait suffisante, c’est que l’on n’a pas compris grand chose à ce réseau traversé par les relations capitalistes et qui positionne nécessairement l’État comme le gouvernement mondial de la bourgeoisie. Il ne suffit pas de renoncer au soi disant confort de ce monde, il ne suffit pas de partir de la ville, il ne suffit pas d’utiliser un langage extrémiste et d’adhérer à un camp que l’on considère comme le bon. Nous ne recommanderons jamais des « sorties » individuelles pour des problèmes sociaux. La perception individuelle d’un problème ne fait pas du problème une question individuelle. Et percevoir les conséquences de la technologie (pollution,  dégradation des relations humaines, etc) dissociée de ses bases capitalistes que nous appellerons « mentales » comme matérielles, constituerait une autre grave erreur.

En finissant de lire cet article on pourrait nous dire : «Quelle contradiction d’avoir écrit tout ça sur un ordinateur !», «Quel manque de cohérence d’imprimer ces idées avec une photocopieuse !». Certains imaginent qu’il y a un « en-dehors de la société » qui fait appel à un certain moralisme qui de plus fait souvent une apologie de la nature de laquelle on est tellement séparé qu’on ne sait même plus à quoi on se réfère en la nommant. Qu’une photocopieuse soit à notre portée ne signifie pas que nous utiliserons tous les moyens qui existent uniquement parce qu’ils sont à notre portée. Nous utilisons certaines machines consciemment et cela inclut de connaître leurs aspects « profitables » comme nocifs, leur coût. Et à l’autre extrême des reproches, celui des apologistes  sans-gêne de la technologie, on pourrait croire qu’être prisonniers de cette société et utiliser certaines machines nous obligerait en plus à les défendre.

 Extrait de la revue Cuadernos de Negación, n°8

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Troisième communiqué d’Henry, en arrestation domiciliaire

tumblr_mrdyryI9iF1ro0ralo1_500J’écris de nouveau aujourd’hui avec un bon moral, avec la force que m’a donné la solidarité,  le regard fixe,  la fierté d’être anarchiste,  le plaisir de vivre en harmonie avec mes mots, après avoir vu de si près le rôle de la justice, protectrice des riches et ennemie des pauvres, qui utilise ses moyens les plus bas comme le montage et ses esclaves délateurs, pour accuser, criminaliser, poursuivre et emprisonner ceux qui ne se conforment pas.

Je suis toujours otage de l’État bienfaiteur du Capital avec plus de 8 mois d’arrestation domiciliaire totale, après 11 mois de prison. On pourrait dire que ce genre de réclusion domiciliaire est une « progression » dans la récupération de la liberté physique, mais ma chambre est ma nouvelle cellule, la maison où je vis est ma nouvelle prison, le contrôle sur ma vie n’a pas disparu, la punition continue de donner son tribut à la société carcérale.  Bien que cette forme d’arrestation n’ait rien d’agréable, ma situation n’a rien de comparable avec les conditions d’isolement que vivent nos compagnon-ne-s prisonnier-e-s révolutionnaires à travers le monde, c’est pour cela que nous devons lutter avec la férocité nécessaire à l’intérieur et à l’extérieur des prisons, jusqu’à ce qu’ils/elles soient de nouveau dans la rue, jusqu’à ce que nous fassions tomber les murs des cages pour humains et non humains.

L’accusation ridicule sur l’existence d’une « organisation terroriste à financement international et tentative d’homicide » reste dans les limbes. Nous les anarchistes nous n’avons pas de chefs, l’autorité nous révulse, parce que celle-ci se base sur la domination et la soumission, et nous n’avons pas de forme d’organisation hiérarchique ni verticale, nous cherchons la libre association et l’affinité politique. Nous pratiquons la solidarité internationaliste, pas seulement envers nos frères/sœurs emprisonné-e-s, mais pour le reste des personnes qui sont dans les prisons, crées, c’est clair, pour protéger le Capital. Le délire étatique continue de soutenir qu’il y a un financement international, avec des liens et des représentants. Chacun de nous, les anarchistes/anti-autoritaires, se représente soi-même, chacun de nous fait partie d’une même lutte, dans laquelle nous ne voyons pas nos visages mais nous nous reconnaissons comme compagnon-ne-s. Celui qui impose la terreur désespérément c’est l’État, à travers son organe politico-juridico-policier, qui punit et poursuit ceux qui luttent pour vivre sans Capital ni ethnocide. Toutes les accusations vont au delà des lois mêmes, eux-mêmes, les oppresseurs, ne respectent pas leurs propres lois, ce sont eux qui les manipulent, corrompent, entravent et nient leur « justice » dont ils font tant d’éloge, qui ne représente que la servilité envers la bourgeoisie.

Le seul crime que j’ai commis c’est de lutter contre n’importe quelle forme de domination. Je ne regrette pas d’être ce que je suis, parce que le regret c’est donner raison à l’ennemi. Je ne regrette pas de lutter contre la société de classes, parce que celle-ci est basée sur l’inégalité et l’oppression. Je n’aspire qu’à récupérer ma mobilité et à rester digne. Je ne me déclare pas « coupable ou innocent », parce que le faire ça serait rentrer dans le jeu du Pouvoir, ce brassage juridique de persécution politique avec ses lois bourgeoises réprime la liberté individuelle de ceux/celles qui n’acceptent pas de vivre dans cette société dictatoriale et autoritaire que nous n’avons pas choisi, au contraire, on nous l’a imposé.

Il faut combattre l’ordre établi, parce que c’est lui qui impose la servilité et la soumission au Capital. Il n’y a pas besoin de réformes ou de conditions « adéquates » pour la révolution. La révolution est un conflit permanent. Le soi disant « processus de changement ou de bien vivre » n’est qu’un déguisement du nouveau colonialisme andin, globalisateur et civilisateur. C’est un chaînon dans la continuité d’autres gouvernements démocratiques et putschistes, parce que tout État est servile au Capital. Il faut lever la tête et nous défendre du terrorisme et de la violence d’État, violence qui au sein de la société trouve son origine de haut en bas. Accepter de vivre soumis veut dire être dans une prison sociale et mentale, sans le courage de rébellion contre l’assassin qui élimine nos désirs de liberté, cet assassin qui utilise les moyens les plus dégradants et méprisables pour détruire ce qu’il combat. C’est indéniable que dans ces terres, partie des Andes, on vit dans une société basée sur le Capital, le spécisme, l’exploitation, l’ethnocide, le latifundium. Nous voyons comment le néo-colonialisme étatique détruit peu à peu les peuples ancestraux, la terre et tout ce qui y vit. L’objectif de l’État c’est d’exploiter, civiliser et domestiquer pour que nous vivions comme dans les pays « développés ». On ne peut pas rester immobiles face à ça. La lutte anarchiste/anti-autoritaire est la lutte pour ne pas être la réplique de ces esclaves du Capital. Notre lutte est réelle lorsqu’elle arrête de n’être qu’une théorie ou lettre morte. Elle se met en marche à partir du moment où l’on refuse une vie aliénée et apathique, à partir du moment où l’on applique au quotidien le refus des contraintes d’un esclavagisme systématique. L’aliénation envers le conflit de la part de la société punitive est quasi totale. La majorité préfère continuer d’être esclave et endormie de façon volontaire. Ça ne les intéresse pas de vivre libres, peut-être par peur ou par conformisme. Parmi les pauvres aussi se reproduisent souvent les schémas d’oppression, d’exploitation et d’autorité lorsque l’envie de ne plus être pauvre n’est que le désir de monter les échelons de la société, de passer d’exploité à exploiteur, ou d’être moins exploité qu’avant.

La lutte doit continuer pour la libération totale. Je veux exprimer mon mépris pour la loi des « droits des animaux » que le Pouvoir avec l’appui des citoyens en faveur du bien-être* sont en train de mettre sur pied dans ce territoire dominé par l’État bolivien. N’importe quelle loi ne fera que normaliser l’esclavage, légalisera la domination, la torture, l’autorité perpétuelle sur les animaux. Tout comme nous ils ont besoin de vivre libres. Une loi ne fera que les condamner à perpétuité, renforçant la relation maître-esclave, propriétaire-animal de compagnie, consommateur-produit. Les « droits des animaux » entretiennent l’existence de la société carcérale, où les cages et cellules sont le reflet de la misère de la conscience et de la solidarité humaine. L’État assure seul cette misère dans sa société. Nous voulons des cages vides, pas plus grandes.

 Au delà des distances politiques je veux saluer les enfants travailleurs qui ont été réprimés et gazés par les « forces de l’ordre » dans la ville de La Paz le 18 décembre dernier; les adultes âgés « victimes de la dictature » frappés et gazés par le régime démocratique sur la place Murillo le 19 novembre; Martha Montiel et ceux qui luttent pour récupérer les corps de leurs proches assassinés et disparus; la résistance du TIPNIS; les guaraníes, takanas, aymaras, quechuas, urus, chipayas, weenhayek, et autres peuples de l’Amazonie, du Chaco, des Vallées et de l’Altiplano, qui se battent pour ne pas appartenir à ce monde civilisateur, domesticateur, et qui subissent le harcèlement étatique permanent et l’asservissement de la part des propriétaires terriens et entrepreneurs.

Salut aux guerrier-e-s en Italie, Espagne, Indonésie, Allemagne, France, Canada, État-Unis, Brésil, Uruguay, Argentine, Pérou, Grèce, Royaume-Uni, Hollande, Croatie; au Méxique à Mario Gonzales, Fallon, Amélie et Carlos; liberté pour les compagnon-ne-s Mónica, Francisco et les autres inculpé-e-s à Barcelone; Juankar Santana Martín, Manuel Pinteño, Gabriel Pombo Da Silva en Espagne; Marco Camenisch pour sa grève de la faim provocante en Suisse; a Thomas Meyer Falk en Alemagne; Ilya Romanov en Russie; aux compagon-ne-s au Chili qui luttent devant et derrière les grilles de cette nouvelle gestion répressive de la démocratie; En Argentine aux compagnon-ne-s arrêté-e-s du peuple kolla qui ont réussi à dévier le trajet du Dakar dans le Jujuy, aux femmes en lutte contre la répression dans la prison d’Ezeiza; à ceux/celles qui résistent en prison avec leur conviction intacte, aux compagnon-ne-s qui utilisent la grève de la faim comme acte solidaire et outil de lutte dans les prisons du Mexique, Grèce, Suisse et Chili. Salutations à Gustavo Rodríguez et Alfredo Bonanno déportés par les régimes capitalistes. Excusez-moi si j’ai oublié des compagnon-ne-s. Mémoire combative pour ceux qui ont perdu la vie en luttant et une grosse bise complice à ceux qui restent en clandestinité, force et courage !

Mon éternel remerciement aux blogs contre-informatifs qui ont diffusé des nouvelles sur ma situation, à tous/toutes les solidaires qui de leur propre initiative ont réussi à faire que l’écho de leurs actions rompe l’isolement et me vole de nouveau un sourire. Contre la société carcérale et ses bourreaux, debout dans cette guerre sociale, contre la société de classes, le Capital, l’autorité, l’isolement et ce qui nous est imposé.

 Libération totale maintenant !!!

 Henry Zegarrundo
Anarchiste/Antiautoritaire

* en espagnol bienestaristas, traduction de l’anglais welfarists

Solidaridad Negra