Autocritique sur le mouvement de libération animale

autocritica

Extraits de la brochure Autocritica al movimiento de liberación animal publiée pour la Première Rencontre pour la Libération Animale en Uruguay en 2010.

Les animaux de compagnie

On dit que le véganisme n’est pas seulement un régime et que c’est par conséquent synonyme d’activisme. De nombreux activistes végans consacrent leur temps et argent aux animaux domestiques. C’est à dire : faire des campagnes de conscientisation auprès des propriétaires (pour bien traiter son animal domestique, ne pas l’abandonner, etc), des campagnes de vaccination, de stérilisation et des campagnes d’adoption.
Face à l’immédiateté et la souffrance d’un être abandonné ils font appel à la charité et à des campagnes légalistes mais ne critiquent jamais la possession même d’animaux.

D’après la publication du groupe allium  » Possession d’animaux domestiques : domination à visage humain « , avoir un animal est un problème en soi et ceci à cause de deux facteurs : la soif de domination et l’auto complaisance égoïste et irrationnelle. Le premier facteur a à voir avec une projection de la domination où le contrôle d’autres êtres (enfants, femmes, animaux) fonctionne comme une « soupape de sécurité » pour la frustration générée par la hiérarchisation que le système social dominateur impose aux humains, établissant et maintenant ainsi de longues et complexe spirales de domination. L’auto-complaisance est l’autre raison pour laquelle les êtres humains ont des animaux domestiques. Cela veut dire que les animaux sont des « coussins » sur lesquelles se repose la conscience pour essayer de compenser les carences affectives. Et l’hédonisme humain est tel qu’il donne la priorité au plaisir individuel sans tenir compte de la liberté des autres ni des problèmes qui dérivent du fait d’avoir des animaux domestiques.

Les principaux problèmes liés à la possession d’animaux domestiques sont :

-la production capitaliste, le business autour des élevages est en plein essor. Vente et soin d’animaux domestiques  amènent avec eux une floraison de magasins d’animaux, cliniques vétérinaires, entreprises qui produisent et commercialisent la nourriture et le matériel pour les animaux de compagnie, etc … Ces entreprises se chargent de maintenir la demande d’animaux domestiques au travers de tactiques publicitaires de tout type, y compris la création de campagnes protectionnistes.

– la surpopulation : le nombre d’animaux domestiques est à chaque fois plus grand, ce qui entraîne une série de problèmes qui vont s’aggraver  à mesure que le nombre de ces animaux augmentera. Certains de ces problèmes sont : saleté, bruits, accidents, attaques, abandons, animaux domestiques devenus sauvages et destructions d’équilibres écologiques, etc …

– la consommation de produits d’origine animale : de nombreux animaux domestiques ont des régimes alimentaires carnivores ou omnivores, est ils ont besoin de s’alimenter avec des produits animaux issus d’élevages, développant ainsi la domination que ceux-ci supposent actuellement sur les autres animaux, sur la Planète et même sur les êtres humains.

– l’insensibilisation envers le reste des autres animaux : posséder un animal domestique détourne l’attention sur une poignée d’espèces domestiquées considérées plus proches ou « humanisées » (anthropomorphisme), générant l’indifférence, tranquillisant les consciences et occultant même la réalité de la domination dont souffrent d’autres animaux domestiqués ou sauvages (vivisection, élevage, etc) des mains d’une bonne partie des êtres humains.

– le développement de la vivisection : les animaux domestiques ont besoin de soins qui sont la raison d’être des vétérinaires, qui basent une bonne partie de leurs méthodes sur l’expérimentation sur les animaux.

– la déshumanisation des relations entre êtres humains : l’un des objectifs de la possession d’animaux domestiques est de « satisfaire » les besoins affectifs des personnes, se substituant aux humains dans ce rôle dans de nombreux cas. Ainsi les problèmes d’isolement, égocentrisme, manque de communication et les nombreux déséquilibres psychologiques en rapport avec cela se voient favorisés, entre autres raisons, par cette zoophilie qui cache les symptômes de ces problèmes en empêchant qu’ils se solutionnent. Pendant ce temps ces problèmes grandissent et déséquilibrent les relations humaines et sociales.

Action directe et pop-corn

 » … pour ne pas nous laisser éblouir par le spectacle et les victoires (médiocres selon nous) de groupes qui ne font que se soucier de sauver quelques animaux et non d’en finir avec la domestication de la vie. »
Tout comme la gauche avec le « Che », le mouvement pour la libération animale a son icône sur des tee-shirt. Bien que celui-ci soit anonyme et pas (encore) aussi connu, il le surpasse en bizarrerie étant donné que sa silhouette est identique à celle d’un autre « sauveur ». Je parle de l’image de l’ange libérateur : une personne cagoulée avec des ailes qui serre dans ses bras un animal qu’il vient de libérer, de la même manière que Jésus tient un agneau dans ses bras.

Cet extrait du texte « la fausse opposition de la libération animale » non seulement critique l’esprit de charité des activistes (sauver un chien d’un laboratoire n’est pas très différent qu’adopter un chien abandonné) mais aussi la mise en scène des actions directes et le fait de ne pas attaquer le système de domination dans son ensemble mais exclusivement les institutions qui dominent les animaux non humains. Il  y a des groupes et des campagnes pour la « libération animale » hors du cadre légal, et même certains qui se disent anarchistes, qui ne sortent pas de la morale chrétienne mise en évidence par des formes altruistes et caritatives, leur  donnant l’image de sauveurs des animaux, en dévoilant ainsi leur spécisme (vu que pour que quelqu’un sauve une autre personne, ce dernier a automatiquement un rôle d’infériorité) et devenant de façon égocentrique martyres de leur lutte comme le montre la multitude d’entretiens et/ou hommages rendus à leurs héros. Il est évident qu’il y a une grande spectacularité autour de ces luttes, sinon comment expliquer les multiples photos des sauveurs cagoulés avec leurs animaux libérés dans les bras (un fétichisme du trophée bien sûr), et les nombreuses vidéos diffusées sans aucun contenu explicitement informatif. Tout cela se limite à nous montrer quelques cagoulés ouvrant des cages avec une jolie bande sonore en fond. Nous croyons qu’ils serait plus illustratif d’expliquer les précautions et les aspects pratiques à prendre en compte pour mener à bien l’action. Le niveau de sensationnalisme est abyssal : animaux maltraités, torturés, humiliés, assassinés, violés, vendus, et tout ça pour sensibiliser les gens lambdas et profiter de leur compassion avec des phrases comme « pauvres animaux ! » Où est passé le reste du discours ? Nous considérons qu’il s’est perdu en chemin. La totalité du discours a été réduite en une partie infime.

Ce qui est vrai c’est que la lutte pour la « libération animale » obtient de nombreuses victoires, ce qui est important est positif. Mais attention, parce qu’elle peut devenir une arme à double tranchant. D’un côté cela peut stimuler d’autres personnes à rejoindre cette lutte, mais d’un autre cela peut amener les activistes à se contenter de cela, qui satisfaits des réussites n’envisagent pas d’autres formes et encore moins de nouveaux contenus, ni d’approfondir ce qui existe.

Le sabotage et la destruction des industries animales peuvent être dirigés contre la transformation des animaux en produits. Cependant, dans certains cas, lorsque ces actions sont menées avec l’objectif de libérer des animaux, elles restent confinées dans une perspective qui ne se soucie que des autres animaux. Par exemple, de nombreux communiqués d’attaques sur des labos de vivisection se focalisent uniquement sur l’oppression des autres animaux, parfois dans des termes moraux, et ignorent les aspects d’exploitation des laboratoires de recherche des universités ou des compagnies pharmaceutiques. Au lieu de détruire les frontières qui nous empêchent de comprendre la domination sociale, des actions comme celles-ci érigent des perspectives limitées qui ne prennent pas en compte les causes subjacentes qui font des animaux des produits. Ainsi, le potentiel de ces actions est fragilisé par la focalisation sur un seul thème au lieu d’être un acte de solidarité lié à d’autres luttes sociales. Cependant, il y a des personnes qui libèrent des animaux en sabotant des  opérations d’exploitation animale sans signer leurs actions comme appartenant au mouvement de libération animale. Cela ne devrait pas être ignoré, parce qu’ils ne les considèrent pas comme importantes pour un aspect de la domination en particulier, mais simplement comme des attaques à l’une de ses diverses formes. Si nous voyons l’exploitation et la domination partout, nous ne devons pas nous limiter, nous devons les attaquer partout où nous les trouvons.