Bonanno de nouveau expulsé, cette fois du Mexique

k6gq

« Les pratiques d’action directe sont maintenant le corollaire de ce bagage conceptuel rajeuni. Face à face avec l’ennemi, sans médiations : voilà la devise et l’emblème d’une pratique d’intention, d’orientation et de possibilité anarchiste ». Rafael Spósito (Daniel Barret)

Il y a exactement quatre ans, trois mois et 22 jours, j’ai reçu l’appel d’un grand compagnon pour m’informer d’une triste nouvelle : ce cher Alfredo María Bonanno avait été arrêté suite à une expropriation ratée dans la ville de Trikala, au nord de la Grèce. Aujourd’hui j’ai eu une brève discussion au téléphone avec le compa Alfredo qui a produit en moi la même indignation et impuissance face à cet appel tragique. Au milieu des cris et des expressions pompeuses des oppresseurs qui lui ordonnaient d’éteindre le téléphone, il m’a informé que les autorités migratoires l’avaient empêché de rentrer sur le territoire dominé par l’État mexicain, le déclarant comme « persona non grata » pour sa soi-disant « dangerosité » et ses « antécédents pénaux », ce pour quoi ils l’ont déporté en Argentine. Malgré le peu de temps que nous avons parlé j’ai ressenti à travers ses paroles brèves la force d’un irréductible. La première chose que je lui demandé c’est comment allait sa santé, et il m’a répondu que ça allait. Furieux, la seule chose que j’ai trouvé à lui dire c’est que je regrettais beaucoup la décision de ces salopards et il m’a répondu optimiste, avec la sérénité et la condition réflexive qui le caractérise : « c’est logique que ça nous arrive ». Oui, avec ces mots simples et ce commentaire concis, Alfredo résumait la réalité du réveil anarchiste du XXI°siècle et la répression logique dont nous souffrons. Sans aucun doute nous sommes devenus le pire cauchemar de la domination. Aujourd’hui l’anarchisme de praxis se lève avec force et demande impérativement la rénovation théorico-pratique et le dépassement des expériences de luttes passées, abandonnant pour toujours la muséographie archéologique, l’immobilisme lâche et l’attitude protagoniste de l’académicien « progressiste » (celui dont se référaient les groupes d’affinité dans un de leurs plus récents communiqués), pour récupérer son humeur transgressive, sa conflictualité permanente et sa nature destructrice. En effet, comme me le disaient certain-e-s des compagnon-ne-s qui ont organisé les Journées Informelles Anarchistes/Symposium International, devant ces événements terribles : à l’Âge d’Or de l’anarchisme classique, dans les années épiques de cette dynamique anarchiste qui s’intensifiait comme paradigme subversif indiscutable, les déportations, les emprisonnements et les assassinats de compagnon-ne-s anarchistes étaient monnaie courante. Combien de fois nos compagnon-ne-s d’autrefois n’ont pas été déporté-e-s et emprisonné-e-s ? Combien n’ont pas été assassiné-e-s et/ou exécuté-e-s sur l’échafaud de monarchies rabougries et de républiques modernes ? Qu’aujourd’hui ils déportent, emprisonnent et assassinent nos compagnon-ne-s  c’est la preuve irréfutable du réveil anarchiste, la meilleure preuve de vitalité et vigueur de notre théorie et pratique, le signe le plus indiscutable du rayonnement anarchiste.

Désormais nous ne pourrons plus faire abstraction de la praxis anarchiste. Aujourd’hui la réflexion théorique et la pratique commencent à se situer dans le contexte historique qui lui est propre, conférant une plus grande prédominance aux compagnon-ne-s récemment intégré-e-s dans la lutte acrate qui insistent sur la communion nécessaire entre idées et action, dans l’urgence inévitable d’entraîner notre théorie dans la pratique et de ranimer notre champs théorique à partir de la pratique.

Malheureusement, le compagnon Alfredo Bonanno ne nous accompagnera pas physiquement dans cet effort gigantesque de rénovation théorico-pratique. Nos ennemis ne pouvaient pas se donner le luxe de permettre une aventure fondatrice transgénérationnelle d’une telle ampleur et c’est pour cela qu’ils ont une fois de plus eu recours à la proscription et aux exclusions. Cependant cette panoplie immense de vibrations communes qui rendent possible la réalisation de ces Journées Informelles est la reconstruction indiscutable de cette épopée transgénérationnelle qui aujourd’hui se concrétise à travers l’anarchisme de praxis. C’est pour cela que, malgré les proscriptions et interdictions, tous les absents seront à nos côtés, face à face avec l’ennemi. Malgré les épreuves nous aurons avec nous notre cher  Bonanno, notre frère Gabriel Pombo Da Silva; la chère Felicity Ann Ryder; Mario González; Stefano Gabriel Fosco, Elisa Di Bernardo, nos semblable Panagiotis Argyrou , Mihalis Nikolopoulos , Giorgos Nikolopoulos , Gerasimos Tsakalos , Hristos Tsakalos, Giorgos Polydoros, Damianos Bolano, Haris Hadzimihelakis, Olga Ikonomidou, Alfredo Cospito et Nicola Gai; Hans Niemeyer; Marcelo Villaroel; Freddy Fuentevilla; Juan Aliste Vega; Carlos Gutierrez Quiduleo; Mónica Caballero Sepúlveda; Francisco Solar; Víctor Montoya; José Miguel Sánchez; Hermes González; Alfonso Alvia et tant d’autres frères et sœurs prisonnier-e-s, en restriction domiciliaire ou en cavale.

Et nous aurons aussi à nos côtés les inoubliables : Sergio “Urubú” Terenzi, Claudia López Benaige, Jhonny Cariqueo, Lambros Foundas, Xosé Tarrío González, el Punky Maury Morales, mon cher Rafael Spósito, Matías Catrileo Quezada, Sebastián Oversluij Seguel et tant d’autres compagnon-ne-s irremplaçables qui sont parti-e-s mais continuent de nous montrer le chemin.

Vive l’anarchie, et que le battement de son cœur rénové s’entende dans tous les confins de la Planète !

Gustavo Rodríguez
Mexique, 24 décembre 2013

P.S. informatif : pour le moment nous avons reçu un premier coup. Comme certains compas le savent déjà nous attendions l’arrivée d’Alfredo à 21h30 et il n’est jamais sorti par la porte d’arrivée. Nous avons demandé au service de Migration et ils nous ont dit que si c’était pour « raison d’interrogation » il pouvait resté de 3 à 5h retenu et si après ce laps de temps il ne sortait pas c’est qu’on lui avait refusé l’entrée dans le pays. Six heures plus tard, désespérés et préoccupés, nous avons redemandé et ils nous ont informé qu’il n’étaient pas autorisé à informer lorsqu’il y a des personnes arrêtées ou expulsées, ni sur les motifs de cette décision. Cependant quelque temps après ils nous ont informé qu’il avait pu être transféré dans les cellules du Terminal I pour être déporté une fois la destination convenue. Je suis allé immédiatement là-bas mais je n’ai pu obtenir aucune information, et nous en avons déduit qu’il avait été déporté. Ce qui est bizarre est qu’il ne m’a pas appelé et qu’il avait son portable éteint, ce qui m’a laissé pensé qu’il pouvait encore se trouver détenu au Mexique.

Et bon, après ce mauvais moment passé, il nous reste l’agréable sensation lorsqu’après trois longues heures d’interrogation, ils ont laissé entrer Constantino Cavalleri et la légendaire Jean Weir, qui ont partagé avec nous leurs réflexions et expériences dans les Journées Informelles. Curieusement, au cours du « profond » interrogatoire que les agents du gouvernement leur ont fait subir, ils ont demandé à chacun s’ils étaient anarchistes, et à la réponse positive ils ont cherché à savoir de quel « type d’anarchisme ». Devant des questions aussi absurdes autant Jean que Costa ont exigé qu’ils soient plus précis, ce à quoi les enquêteurs ont répondu « qu’il y a un anarchisme bon et un anarchisme mauvais », élucubrations qui complétaient la question suivante : Quels sont vos héros ou personnages légendaires ? Et ils terminaient par la question à un million de dollars : vous venez au Symposium anarchiste ou à l’Escuelita Zapatiste ? Sans aucun doute la réponse de cette dernière question permettait à ces agents de cocher dans la bonne case sans se tromper.

Viva la Anarquía

Actions directes en hommage à Sebastián

Le jeudi 19 décembre aux alentours du campus Juan Gómez Millas de l’Université de Chile une trentaine de jeunes combattants et subversifs ont réalisé une action dans le cadre de la semaine d’agitation pour les compagnon-ne-s Francisco et Mónica prisonnier-e-s de l’États fasciste espagnol associé avec l’État chilien, mais cette action était aussi en solidarité avec les compagnons Marcelo Villarroel Sepúlveda, Freddy Fuentevilla Saa, Juan Aliste Vega et Hans Niemeyer Salinas qui sont actuellement en grève de la faim. Comme d’habitude dans notre lutte de rue, nous restons une fois de plus anonymes, utilisant notre compagnonne de toujours, la capucha (Ndt : cagoule avec un tee-shirt), et cette fois nous séparant en deux groupes, rouges et noirs, montrant ainsi un niveau d’organisation à ceux qui privent de liberté. Qu’ils voient que notre lutte est sérieuse, et que les compagnon-ne-s, bien que prisonnier-e-s, ne sont pas seul-e-s. Dans un acte de solidarité avec le feu et la rage dans nos mains et jetant des tracts, nous avons décidé de couper l’avenue Grecia aux alentours de 18:30, attendant la réponse des laquais de l’État, nous avons ainsi une fois de plus lancé notre lutte insurrectionnelle. Dans un autre endroit, armés de boucliers et avec une grande quantité de molotovs fendant les airs et criant des slogans qui sortaient du plus profond de notre cœur, nous avons rompu le quotidien …

Nous avons aussi réalisé cette action pour notre compagnon Sebastián Oversluij, assassiné par un gardien du capital et de la propriété privée le 11 décembre dernier, lors d’une expropriation dans une succursale de la Banque Estado dans la commune de Pudahuel. Que le sang versé ne reste pas impuni, la lutte continue !

N’oublions pas le montage de l’État contre Víctor Hugo Montoya, et tous nos compagnon-ne-s mis-e-s en cage pour lutter contre toute autorité. La flamme de la destruction ne s’éteint pas, nous continuerons de lutter jusqu’à ce que la dernière cage soit détruite. Pour en finir avec le quotidien de la société esclavisée, pour en finir avec les schémas de l’autorité et les lieux où ils nous endoctrinent. Reconnaissons nos chaînes pour lutter …Liberté aux prisonnier-e-s en lutte.

Nous avons aussi diffusé des tracts au sujet de nos 14 compagnon-ne-s détenu-e-s il y a 3 mois dans la población de Villa Francia, à l’occasion de la commémoration des 40 ans du coup d’État et de la dictature militaire. Nous exigeons la libération de tous/toutes nos compagnon-ne-s qui luttent, et qu’ils sachent que nous ne n’arrêterons que lorsque nous en aurons fini avec tous les bastions de l’oppression. Tant qu’il y aura des compagnon-ne-s en prison nous serons dans les rues.

Notre jeunesse combattante avance sans peur jusqu’à la libération totale !

Pour la fin de la société carcérale qui enferme ceux qui luttent !

On n’oublie pas un compagnon assassiné, car il vit dans chaque action !

Marrichi wew ! (NdT : en mapudungun nous vaincrons toujours)

« Angry, ta graine insoumise se multiplie dans chaque individu qui veut attaquer cette quotidienneté et tous ses modèles imposés dans le monde par la société ».

Liberté pour les prisonnier-e-s en guerre !

19dicjgm2 19dicjgm3 19dicjgm6 19dicjgm8 19dicjgm9

hommodolars

Vidéo d’une autre action réalisée en hommage à Sebastián :

http://www.youtube.com/watch?v=jT9lqUaqh0o

Cette vidéo est un geste incendiaire en solidarité avec le compagnon assassiné Sebastián Oversluij lors de l’attaque contre la banque Estado le 11 décembre. Tout acte qui implique de s’assumer dans la confrontation avec cet ordre, toute initiative de rébellion, mérite d’être retenu et revendiqué par ceux qui se définissent comme anti-autoritaires ou anarchistes.

Nous lançons ainsi un appel aux compagnon-ne-s pour que les coups que nous donne l’ennemi ne restent pas impunis, pour que la révolte soit constante et que la subversion se propage jusqu’à fissurer les fondements de cet ordre dégouttant. Faisons en sorte que la mort de Sebastián ne reste pas impunie, que les puissants sachent que s’ils touchent à l’un de nous ils touchent à tous et que la rage anarchiste se propage dans les esprits et les rues plus rapidement que ce que leurs caméras peuvent capter et leurs stupides enquêtes comprendre. Multiplions les formes d’attaque et faisons notre possible pour que les idées contenues dans chaque action deviennent plus claires et précises.

Il n’est jamais inutile de rappeler que la guerre sociale se joue sur tous les fronts et que ça n’est pas uniquement une histoire de se focaliser sur la simple violence et de faire le con. Il faut changer notre perspective de vie, critiquer et attaquer les logiques autoritaires où qu’elles soient, propager nos idées à travers chacune de nos actions, développer des pratiques d’autonomie et d’autogestion et au fur et à mesure augmenter les fissures qui finiront par désintégrer cette réalité de domination et d’exploitation. Que l’incendie soit beau comme nos esprits et qu’il ne soit pas un acte de vanité.

Notre vengeance est en train de se forger et ils le savent, c’est pour cela qu’ils se désespèrent, c’est pour cela les montages et les surveillances, c’est pour cela la manipulation médiatique et la criminalisation. Mais qu’ils se mettent bien dans la tête que nous sommes chaque fois plus nombreux, que la haine contre ce système de merde se propage et que l’amour de la vie nous pousse à continuer de rêver et d’attaquer.

Sebastián Oversluij présent !

Un appel affectueux et incendiaire à la révolte et la guerre sociale contre l’État et le Capital.

Réflexions au sujet du refus de laisser entrer Bonanno sur le territoire chilien

“Voyez le peu que nous sommes et pourtant ils inventent des tas d’histoires dans la presse, et pourtant ils n’arrivent pas à faire l’ombre sur ce que nous avons à dire. Regarde le peu que nous sommes et pourtant les injures contre nous se transforment en sanglots, leurs argument deviennent tout petits, en ayant tout le pouvoir entre les mains, « seul » ils ont peur du moindre de nos gestes. Voyez le peu que nous sommes et tu verras que d’un jour à l’autre ils seront des millions comme nous, et alors ils auront raison d’avoir eu si peur de nous ». Domingo Murua (Chuma)

Dans le cadre du cycle de discussions dans le cône sud sur la lutte insurrectionnelle anarchiste avec Alfredo Bonanno, la venue du compagnon était programmée à 23:50 le jeudi 12 décembre. Malheureusement la PDI (Police d’Investigation) l’a empêché de rentrer dans le pays en utilisant l’argument de ses antécédents pénaux.

L’État chilien est ainsi vu comme une prison où l’on interdit ou accepte l’entrée de ceux qu’il considère potentiellement dangereux. Alfredo, dans le langage du pouvoir, encouragerait des idées qui tendent vers la destruction ou l’altération par la violence de l’ordre publique ou du gouvernement. Quelques heures plus tard le compagnon est renvoyé en Argentine, d’où il venait après y avoir réalisé un cycle de discussions.

Ce n’est qu’après que nous avons appris par la presse bourgeoise que l’interdiction d’entrée dans le pays avait été donnée par le ministère de l’intérieur il y a à peu près un mois, à la publication de propagande sur le cycle de discussions que donnerait le compagnon à Montevideo, Buenos Aires, Rosario et Santiago.

Pas besoin d’avoir l’esprit vif pour se rendre compte de la raison qui a poussé l’autorité à prendre une décision comme celle-là. Une telle mesure a un rapport, en partie, avec l’arrestation de cinq compagnon-ne-s anarchistes à Barcelone, parmi lesquels se trouvent Mónica Caballero et Francisco Solar, compagnon-ne-s accusé-e-s antérieurement dans le Caso Bombas, et la chasse aux sorcières qui a suivi au niveau international. D’autre part, une telle décision serait aussi fondée sur la peur que provoque pour l’État chilien la diffusion d’idées anti-autoritaires et les réflexions qui émergent à partir de celles-ci, au sujet des manières concrètes de s’investir dans la lutte.

Nous nous demandons ce que cache un mauvais tour comme celui-là. Dans quel but on refuse l’entrée dans le pays d’un compagnon qui venait pour faire des conférences publiques en Uruguay et Argentine ?

Nous avons toujours su que ce scénario était envisageable, et malgré cela nous avons décidé d’aller de l’avant en nous coordonnant entre compagnon-ne-s, au delà des frontières que nous imposent les États.

Pour nous il est clair que le pouvoir essaie de freiner le partage d’expériences de lutte (d’un pays à l’autre et/ou d’une génération à l’autre), de couper les liens de compagnerisme, de paralyser les réseaux solidaires et de poursuivre les connexions internationales que génère la lutte anti-étatique. Mais avec la même fermeté ils essaient de freiner la diffusion de quelques certitudes : nous pouvons avoir des rapports non hiérarchiques entre nous et nous pouvons combattre l’autorité où qu’elle se trouve.

Cette action de l’État nous rappelle que le pouvoir maintient intacte la mémoire au moment de faire face aux révolutionnaires. Autant la trajectoire de vie en conséquence avec ses idées que l’obstination à lutter, sont des principes de vie que nos ennemis ne tolèrent pas. Ils se mettent le doigts dans l’œil en pensant que leur action va éteindre la flamme dans chaque cœur rebelle et cela est vrai autant pour le compagnon Bonanno que pour tous/toutes les compagnon-ne-s qui dans les différentes régions continuent de s’opposer à la domination.

Assurément ils espèrent nous effrayer ou même nous démoraliser dans ces moments difficiles où nous déplorons la perte du compagnon Sebastián Oversluij, mais nous n’allons pas assimiler la logique répressive et elle ne nous fera pas plier non plus. Avec la mémoire prête pour le combat, nous allons garder vivant le souvenir de chaque compagnon-ne tombé-e en action.

Et ça n’est un secret de polichinelle pour personne : pour les anarchistes/anti-autoritaires il n’y a pas d’obstacles qui se dressent contre la volonté de lutter, car la pleine liberté sait surmonter les circonstances adverses, les cages, les murs et les frontières. De cette façon la solidarité et l’internationalisme cessent d’être de mots vides et s’enflamment de la passion que seule la lutte permet.

Parce que notre histoire est remplie de résistance offensive et notre présent déborde de lutte contre le Capital, l’État et toute forme d’autorité.

Avec la mémoire tournée vers les compagnon-ne-s mort-e-s … Claudia, Jhonny, Mauri, Sebastián … Présents !

Coordinateurs/trices de la Journée Noire Informelle – Santiago

 Hommodolars

pre-afiche1

Lettre de Hans Niemeyer à l’occasion de sa grève de la faim solidaire

relampagoLe sang de nos frères a de nouveau coulé

La nuit tombe sur la ville de Santiago et ma cellule est illuminée par l’écran de la télé. Je me penche à la fenêtre qui donne sur la ville et j’essaie de regarder entre les barreaux vers Pudahuel. L’usine à opinion publique a diffusé au journal de ce soir le visage de nos compagnons arrêtés après un soi disant braquage raté dans une succursale bancaire. Les images ont montré le corps inerte de notre frère et d’un misérable général carabinier félicitant le garde qui a tué Sebastian Oversluij.

Tandis que l’ennemi danse et célèbre la mort de Sebastian (rappelons-nous que TVN avait donné comme titre à l’info « un garde héros ») je verse des larmes pour sa vie, pour ses actions, et pour sa mort. Je ne te connaissais pas, mais la douleur serre mon cœur. J’imagine la dévastation de ta famille, de tes amis, de ceux qui t’ aimaient. De façon un peu masochiste je ne peux m’empêcher de penser à des compagnons morts -trop malheureusement-, et j’imagine ce que penseraient ses parents et être aimés. Ils se rappelleraient de ses premiers pas, de sa grâce d’enfant, ses jeux, lorsqu’ils l’amenaient à l’école, et la fois qu’il a dit qu’une fille lui plaisait ? Je ne  connais pas ta vie Sebastian, mais je regrette ta mort, je pleure la perte de ta belle et généreuse vie des mains d’un mercenaire au service du capital, d’intelligence réduite qui a vécu dans les quartiers autour de Vivaceta, entre éleveurs de chevaux et l’hippodrome, jusqu’à ce que sa tendance à la psychopathie et aux capacités intellectuelles nulles le fassent rentrer à l’école de sous-officiers de l’armée, participer à une mission à Haïti, suivre le cours de protection de personnes importantes aux États-Unis et devenir mercenaire en Irak.

Mais pour le système la mort de Sebastian Overslui sonne l’heure de la fête, du rire sinistre et spasmodique, de l’orgie incestueuse entre journalistes et policiers, la fête des nuisibles qui crachent en se tordant dans leur micro leur discours de mort et pauvreté, se disputant la place pour pisser sur le cadavre de Sebastian. Est-ce que c’est parce qu’ils ont si peur qu’ils célèbrent sa mort ?

Ils sont tellement peu sûrs du système et de l’ordre social capitaliste que de temps en temps ils ont besoin de célébrer la mort d’un rebelle. Ils sont tellement peu sûrs dans leur poste de juges, procureurs, journalistes et policiers – la vraie lie de la société- qu’ils ont besoin des armes pour rester au pouvoir. Aussi satisfaits de leurs privilèges sont ces ploutocrates et politiques de cirque qui ont toujours besoin de plus de prisons, de peines toujours plus longues et toujours plus de contrôle pour maintenir l’ordre social capitaliste.

Mais j’ose prédire, tel un ermite aveugle qui crie dans le désert, que le danger est au coin de la rue. Peut-être qu’ils n’ont pas ouvert les portes de l’enfer, mais les choses ne vont pas en rester comme ça. Et ceci n’est pas que la fanfaronnade impuissante d’un prisonnier enterré sous des tonnes de ciment et de grilles. Il y a une rébellion qui n’a fait que commencer. Celui qui ne le voit pas c’est qu’il ne le veut pas, les signes sont dans les rues, sur les murs, dans les toilettes de lycées. En respirant l’air on n’a pas besoin d’être météorologue pour savoir dans quelle direction souffle le vent, comme disait Bob Dylan.

Je viens d’apprendre à la télé qu’ils ont empêché Alfredo Bonanno d’entrer au Chili pour faire des conférences, alors qu’il avait aussi proposé de rendre visite à des prisonniers dans cette même prison où je suis. Mais le système a peur des idées qui prennent chair, qui se matérialisent par des actions concrètes, c’est pour cela qu’il les interdit, les censure, les proscrit et en fait son nouvel ennemi interne à vaincre, c’est à dire, l’anarchisme insurrectionnel. Cependant, à l’expulsion de Bonanno d’autres éléments doivent être ajoutés pour montrer comment les différentes factions du pouvoir s’alignent contre le nouvel ennemi interne, ce qui se voit clairement dans l’action de la justice pénale et dans ce que génère le nouvel instrument juridique pour combattre la lutte dans la rue : la loi anti-encapuchadxs et la loi de contrôle préventif d’identité.

Au risque d’être auto-référent permettez-moi de citer un paragraphe de la sentence de la court d’appel qui a a validé ma condamnation pour engins explosifs et dommages sur une succursale de la banque BCI le 30 novembre 2011, de 5 ans de prison et 300 jours sans droit à la liberté surveillée. Dans cette sentence de la Cinquième salle de la court d’appel, composée par les ministres Jorge Dahm Oyarzún, María Rosa Kittsteiner Gentile et l’avocat  Ángel Cruchaga Gandarillas (hautement aristocrate) ils montrent des arguments qui sont un véritable bijou du droit pénal bourgeois et de la restitution concrète du délit idéologique au Chili. Leurs altesses illustrissimes et putréfiées disent :

« Et s’il est possible de considérer que les mobiles qui mènent l’inculpé à agir de cette manière obéissent à ses convictions intimes, et que ses convictions soient erronées ne l’empêche pas d’agir, sa conduite postérieure prouve qu’il ne fait aucun effort pour remettre en question ses idées ou du moins pour insérer sa conduite dans le milieu social auquel il appartient. Ceci a été démontré lorsqu’il ne s’est pas présenté à l’autorité lorsque sa liberté provisoire a été révoquée, et en plus de cela il a envoyé des messages à la société en défiant ouvertement le système judiciaire à travers des interviews avec des médias, expliquant la raison de sa rébellion et persistance dans son comportement anti-juridique ».

À la suite de quoi Dahm a déclaré :  » … il faut compter sur une collaboration et volonté minimale de l’accusé pour qu’il comprenne la nécessité d’observer des normes basiques de coexistence dans le groupe social, et si ses idées vont à l’encontre de celles de la société en général, de manifester sa non conformité à travers des actes qui ne font pas du tort, au moins physiquement, aux autres ».

Le ministre Dahm en arrive à faire rire avec son culot de parler d’actes qui ne font pas du tort, au moins physiquement, aux autres. Et qu’en est-il du sang des nôtres ? Qu’en est-il des millions d’exploités de cette société capitaliste brutale, où l’on n’a même pas droit à une vie digne ? Qu’en est-il des étudiants frappés par la police, des prisonniers torturées en prison, des habitants de Aysén et Freirina qui se sont fait tirer dessus à bout portant ? Et qu’en est-il de la justice de Dahm pour Matías Catrileo, Jaime Mendoza Collìo, Alex Lemùn, tous assassiné en démocratie ? Combien de policiers ont été ne serais-ce qu’un jour en prison pour tous ces assassinats (sic)? Que les administrateurs momifiés de cette pantomime et mascarade ne me parle pas de justice ni ne me fasse de leçons de morale. Leur mots ne sont pas plus qu’une coquille vide.

Je voudrais finir en disant que je me joins au jeûne solidaire qui est mené dans la Prison de Haute Sécurité par le collectif de prisonniers subversifs en soutien à Mónica Caballero et Francisco Solar, emprisonnés par l’État espagnol. Personnellement lorsque j’ai été arrêté j’ai reçu un geste de solidarité de Francisco et aujourd’hui je n’ai rien d’autre que cette grève de la faim pour que ma solidarité traverse la mer et arrive jusque dans les froides et sinistres cellules du régime FIES pour lui dire qu’ils ne sont pas seuls. À mon jeûne où je ne consommerai que du liquide je veux aussi donner ma solidarité aux amis et proches de Sebastián Oversluij pour son assassinat des mains d’un mercenaire et célébré par la presse et la police.

Je lance un appel à réaliser des gestes concrets de solidarité avec Monica et Francisco, à dénoncer avec force l’assassinat de Sebastián Oversluij et à démarrer l’agitation rebelle jusqu’à la commémoration des 6 ans de l’assassinat de Matías Catrileo dans le Wallmapu*.

Sebastian Oversluij présent, ta mort ne sera pas en vain !
Solidarité avec Francisco et Mónica, prisonnier-e-s en Espagne!
Sebastiàn et Matías, que votre sang versé devienne des graines de rébellion !

Hans Felipe Niemeyer Salinas
3 º étage Module H Nord
Prison de Haute Sécurité (CAS).

12 de Décembre 2013
Santiago de Chile.

Viva La Anarquía

* Le Wallmapu ce sont les territoires mapuches

 

Communiqué d’un-e detenu-e de Villa Francia

Au sujet des détenu-e-s de Villa Francia voir ici

asdfvcxzAujourd’hui cela fait trois mois que j’ai été arrêté, et je me suis réveillé dans la normalité routinière qu’est devenue ma maison/prison, lorsque la nouvelle est arrivée, amenant avec elle les pires souvenirs. Un compagnon était mort alors qu’il faisait un braquage. Au début j’étais emparé par le doute, et puis la presse bourgeoise guidée par la morbidité et la logique de l’exposition balança les gros titres, un délinquant abattu et deux détenus dira l’un des journaux. Mais la réalité pour nous, ceux qui décidons de faire le pas dans la lutte, n’est pas la même que pour ces médias bourgeois qui essaient de garder leur soi-disant tranquillité.

La nouvelle est arrivée avec un vent froid en ce matin ensoleillé du dernier mois de l’année. Un guerrier est mort au combat avec son arme à la main, il a été abattu par un homme de main, un gardien des intérêts des puissants. Tandis que ces médias essaient de se nourrir du corps  du compagnon encore tiède de haine contre cette société autoritaire, le bâtard qui a tiré contre ce guerrier est traité comme un héros. Un héros pour avoir défendu les intérêts du capital, un héros pour avoir tiré sur un guerrier qui avec courage affronte sa vie et aussi sa mort.

Il est difficile de garder le fil conducteur vu que les sensations et sentiments vont et viennent, faisant revivre des moments passés, où d’autres compagnon-ne-s sont tombé-e-s au combat en faisant naître l’offensive.

Engendrer une relation étroite entre ce qui se dit et ce qui se fait …

En laissant derrière les distances personnelles, les mots qui surgissent pour le compagnon sont chargés d’amour. Un guerrier comme toi ne meurt pas. Un guerrier comme toi se multiplie chaque jour dans les différentes actions qui cherchent à en finir avec cette réalité qu’ils nous ont imposé, un guerrier comme toi vit dans chaque cœur insurgé qui cherche l’obscurité pour perpétrer l’action révolutionnaire, un guerrier comme toi est chaque jour en relation d’affinité, se posant avec le corbeau noir de l’informalité.

Depuis le silence de ma réclusion je me rallie à ta décision de lutte, et depuis l’impossibilité de me rallier à l’action révolutionnaire je crie contre toute autorité. Multiplions les moments d’attaque contre la domination et le système autoritaire.

Compañero Sebastian Oversluij, notre action sera présente à chaque instant tant que la domination existe … Vive l’Anarchie !

un-e détenu-e à villa francia

hommodolars

[Grèce ]Texte des prisonniers anarchistes Alexandros Mitroussias et Giorgos Karagiannidis

hid

Bien sûr, la contradiction est ce qui alimente la critique de nos détracteurs. Ainsi, la soi-disant »défaite » de la revendication de responsabilité est utilisée en même temps comme l’alibi de base des anarchistes innocents emprisonnés et de leurs solidaires pour prouver qu’ils n’ont pas de lien avec ce dont les flics les accusent (par exemple le procès pour les 250 attaques de la Conspiration des Cellules de Feu, où sont poursuivis avec nous d’autres personnes étrangères). Si la « défaite » du choix de la revendication de responsabilité pris par nous n’existait donc pas et que nous avions recourus à un vague flou, puisqu’en outre il n’existe légalement pas de preuves (empreintes digitales, ADN, témoins visuels) contre nous, alors peut-être que quelques-uns en viendraient à « se plaindre »…

Cette citation précise est un extrait d’un texte de la CCF publié le 15 octobre 2013 [1]. De notre côté, nous voudrions clarifier toutes les discussions soulevées au sein du paragraphe sus-dit, dans leur tentative de créer une impression à travers une manière de s’exprimer vague qui exacerbe la confusion. Tout d’abord, l’emploi du terme « de leurs solidaires » est très problématique, car c’est offensant pour tout-e compagnon-ne qui a participé à des mouvements de solidarité envers nous d’être mentionné comme « notre » solidaire. L’usage du pronom possessif est incorrect puisqu’il laisse entendre que chaque prisonnier a ses solidaires propres et exclusifs.

Nous n’avons donc pas « nos » solidaires car nous ne pensons pas en de tels termes. De plus, jamais jusque-là nous n’avons fait référence aux poursuites auxquelles nous faisons face en utilisant la dualité légale innocent/coupable parce que ces concepts découlent de la justice bourgeoise. Dans aucune circonstance donc, nous n’avons invoqué notre innocence de manière générale et vague avec pour seul but des peines plus favorables. Les tribunaux peuvent nous condamner mais pas nous juger, ils peuvent nous acquitter mais pas nous innocenter. Nous avons reconnu ce qui nous correspond et nous avons déclaré que les armes que nous portions n’ont pas de lien avec l’action de l’organisation. Pour nous, notre présence au tribunal renferme la preuve de la démonstration des tactiques et manipulations de la part de la police et des juges qui ont donné lieu à notre inculpation sous les charges les plus élevées possibles, avec jusqu’à maintenant quatre affaires judiciaires différentes contre nous et éventuellement encore une autre à venir de l’État italien.

Malgré tout, la CCF persiste, soit au tribunal, soit dans ses textes, de nous mentionner dédaigneusement, ainsi que d’autres, comme « accusés innocents ». Et on ne peut que s’inquiéter que la dualité innocent/coupable soit intégrée dans le discours d’une organisation révolutionnaire, une dualité ennemie qui est introduite par le pouvoir étatique et sur lequel tant de brochures et de textes ont été écrits.

Pour nous, la revendication de responsabilité pour participation à une organisation ne constitue pas une défaite et nous ne partageons pas de telles logiques. De toute manière, personne ne se déclare innocent parce que d’autres anarchistes ont revendiqué la responsabilité pour participation à une organisation. La position qui dit que la revendication des membres de la CCF s’utilise comme alibi – principal – par tous ceux qui sont accusés avec eux est inconsistante. C’est-à-dire que l’on n’invoque pas le manque de preuves de la part de la police mais que l’on revendique que certains sont membres pour faire face à chaque accusation ? Cela ne s’est jamais passé.

Nous sommes en prison depuis près de trois ans, faisant face à de longues peines de prison et des allégations sur lesquelles nous n’avons pas été encore jugés en première instance. Quand nous voulons intervenir publiquement en utilisant Indymedia, nous ne le faisons pas pour participer à une arène publique mais à un cadre d’information. Nous avons conscience que cette intervention n’offre rien en soi, cependant laisser un fait imaginaire être restitué comme une vérité, d’une manière délibérément abstraite crée la confusion et donne libre cours à des insinuations.

Alexandros Mitroussias, Giorgos Karagiannidis
Prison de Korydallos, 22 octobre 2013

Source : Indymedia Athènes

En anglais

[1] http://theparabellum.squat.gr/2013/10/15/spf-sxedio-foinikas-7-prakseis-kai-1-apologismos/ (en grec)

[Cordón Macul] Un peu de chaleur pour les élections

Au Cordón Macul on ne vote pas ! On sort dans la rue !

Les 18, 20 et 22 novembre avant la farce électorale terminée récemment, nous avons monté des barricades et fait face aux flics, les compagnon-ne-s des 3 universités (UTEM, Uchile, Pedagógico), au carrefour de Macul et Grecia.

Quelques jours avant l’élection présidentielle, Bachelet et Mattei (Ndt : les deux principales candidates) nous parlent au travers de leur médias (télé, radio, journaux), de la participation, de l’égalité des chances, des droits, du progrès acclamé … mais en sachant qu’elles gouvernent pour les patrons, exploiteurs et oppresseurs qui nous amènent une vie de misère et de mort, pourquoi continuent-elles à nous gouverner ? Parce que le « peuple » continue de voter, légitimant leurs mandats .. « nous avons été choisis par les gens et notre droit de gouverner est légitime … »

Et est-ce qu’il n’y a que les élections qui sont la cause de notre mode de vie si misérable ? Est-ce que si on arrêtait de voter on arrêterait de vivre dans la misère ?

On est citoyens à chaque fois qu’on se comporte comme tels, c’est à dire, à chaque fois qu’on fait ce qu’on attend de nous : travailler, consommer … Voter tous les 4 ans n’est pas si important. C’est au travers de notre comportement au quotidien que nous reproduisons vraiment cette vie qu’on nous a donné.

Le citoyen c’est de nos jours la pièce principale du « démocratique », la manière de contrôler et dominer la plus importante, la plus sûre, car nous visons en pensant qu’on peut bouger en toute liberté, que nous sommes libres de choisir, mais nous ne faisons pas autre chose que reproduire notre misère.

Mais où est la résistance contre cette précarité, cette exploitation et oppression ? Dans la façon de ne pas s’habiller comme les autres, de ne pas manger si ou ça, de penser différemment, de dire que tout va mal, de voler et ne pas acheter, de prendre à celui qui a tout pour le donner à quelqu’un d’autre ?

Et tout cela ça a été suffisant ? Est-ce qu’on a arrêté de vivre dans la misère ?

Aujourd’hui il n’y a que du malaise, cette impossibilité d’exprimer une résistance commune face aux conditions de précarité et de misère quotidienne dans laquelle nous vivons.

Tant que nous continuerons de vivre dans cette société capitaliste il n’y aura que misère et mort.

Certains diront qu’on peut changer les choses pacifiquement, mais l’histoire a prouvé le contraire et continue de le montrer lorsqu’ils répriment et tuent ceux qui se rebellent contre cette vie dans laquelle on nous a traîné. Nous savons que tôt ou tard on se trouve face au bras armé de l’État, militaires et police. Ils feront tout ce qu’ils peuvent pour freiner le conflit ouvert qui devient inévitable. L’insurrection qui se rapproche chaque jour un peu plus. Leurs raisons et tentatives de l’enrayer ne dépend ni de nous ni du gouvernement.

Malgré tout son contingent policier mobilisé (le 22 novembre, 3 canons à eau, 2 blindés lance gaz, 2 bus et un nombre incalculable de voitures, motos et civils), malgré toute leur préparation, leur harcèlement quotidien, ils n’ont pas réussi à faire taire notre malaise, notre lutte. Et nous sommes prêts à lutter jusqu’à la fin, il n’y a pas d’autre chemin. Ils ne pourront pas freiner notre mécontentement et notre rage contre ceux qui nous ont exploité et opprimé chaque jour.

C’est pour cela que nous saluons les compagnon-ne-s arrêté-e-s à Barcelone par la police espagnole, Mónica Caballero, Francisco Solar et les autres compagnon-ne-s. À Hans Niemeyer et Celestino Córdova, emprisonnés par la police chilienne pour lutter contre cette vie de misère, contre les patrons et latifundistes.

Notre lutte contre le capitalisme est mondiale, et doit avoir lieu dans toutes les situations possibles, à chaque instant, dans chaque endroit.

Aujourd’hui nous parlons derrière la force de l’anonymat qui vit en chacun de nous et nous apprenons à nommer l’ennemi … que le malaise se transforme en action, car dans la force de l’anonymat réside la possibilité que celui/celle qui réalise l’action peut être n’importe qui, nous sommes cette force anonyme qui est en chacun-e.
Mais souvenez-vous que nous sommes là, dans l’attente, car le moment arrivera, l’insurrection avance et devient inévitable … fais de ta vie un acte de sabotage.

Et le bilan de la journée, entre autre, est : routes coupées, attaque du quartier général de l’O.S.9 (Ndt : département de carabiniers spécialisé sur les organisations criminelles, et qui a la mauvaise idée de se situer sur l’avenue Macul), affrontements avec la police, un tank lance-gaz endommagé à cause de l’incendie du moteur, entre autres choses.

Que l’insurrection devienne permanente, arrêtons d’être citoyens, créons la guerre civile.

Cordón Macul, Santiago , Chili, 27 novembre 2013

hommodolars

c-2 utem20nov1

f-2 utem20nov4

Communiqué de lycéens de l’Instituto Nacional

6087998478_3892b81c4b

Je ne parle pas de choses abstraites, je suis quelqu’un de très concret. Je te parle de prisonnier-e-s, de blessé-e-s, de mort-e-s, de personnes expulsées du lieu où elles vivent, de personnes qui meurent en cherchant un salaire. De personnes démolies dans leurs têtes parce qu’elles mangent des pilules contre la tristesse. La terre détruite par les routes. Les élevages, les centres de rétention et avant ça la guerre (…) Ça te semble exagéré notre manière de penser, mais c’est comme ça. La guerre c’est comme ça. Ici il y a une guerre et toi fais ce que tu veux.”
PIB – Ponte como quieras

Ce système est pourri depuis sa racine. L’ambition d’une poignée de personnes et l’idiotie-passivité de beaucoup qui n’ont rien fait pour faire face à ça, nous mène, ou nous a déjà amené, à une catastrophe naturelle presque sans issue. Et nous croyons vraiment que nous pouvons maintenir ce mode de vie d’une manière durable ? … impossible. Nous produisons 1000 fois plus que ce dont nous avons besoin et les médias nous mettent ces produits dans la bouche en les présentant comme nécessaires. Et même si nous arrivions à maintenir ce mode de vie durablement (comme le voudraient certains écologistes) nous savons que ça ne servirait à rien parce que nous en avons marre de ce mode de vie misérable et nous ne voulons pas continuer d’amener de l’eau au moulin de ce stupide progrès, nous ne voulons pas gaspiller nos vie à travailler du lever au coucher du soleil, nous ne voulons pas passer les meilleures années de notre jeunesse enfermés dans une école avec de pathétiques jours de repos accordés uniquement pour nous rendre plus productifs, et nous ne voulons pas non plus mourir d’un cancer ou d’une de ces maladies modernes provoquées par toute la merde qu’ils ont fait de notre alimentation. Ce qui est certain c’est que ce système c’est de la merde et sur ça y a déjà suffisamment de choses écrites.

Ce qui est important c’est que face à tout cela l’école n’est pas un salut, comme beaucoup veulent le faire croire, mais elle est une horrible institution dans laquelle on nous prépare pour cette vie. Dans ce lieu on nous apprend à obéir sans poser de question, les horaires, la routine, les façons d’agir et de suivre une ligne de conduite qui ensuite nous servira pour devenir un engrenage de plus, de la main d’œuvre ou un professionnel avec des activités stupides et routinières. Ces choses qu’on nous enseigne ne sont utiles que pour ce système. Tu veux être ingénieur pour construire des grands centre commerciaux ou des immeubles ? Pourquoi faire ? Si c’est ce que nous devrions abattre.

Mais le sens que nous donnons au terme nocivité, dépasse celui de la simple capacité de mettre en danger la santé d’un organisme ou d’un écosystème. Nous parlons sous les yeux de la nocivité culturelle, politique, sociale mais la situation que nous souhaitons identifier c’est le processus qui caractérise la relation de pouvoir, de technologie et de manipulation, de destruction du vivant, des intérêts de l’héritage acquis par l’industrie scientifique, de millier d’années de pensée autoritaire et anthropocentrique. Quelque chose qui va bien au-delà d’un problème sanitaire, impliquant les aspects fondamentaux d’une civilisation technologique qui se nourrit du temps et de la vie de milliers d’individus humains et non humains, qui trie et redivise les êtres vivants en races, en espèces, en catégories rentrées dans une échelle hiérarchique qui classifie selon ses nécessités ”.
Extrait du “Manifiesto Della coalizione contro ogni nocivita”. Dans “Nanotecnalogie: la pietra filosófale del dominio” Revista II silvestre 2011

Pour les raisons déjà citées (et bien d’autres dont nous n’avons pas le temps de parler) nous avons décidé de poser une bombe de fumée (NdT : dans le lycée), dans un but plus symbolique que destructeur, afin que cette pestilence se souvienne et imprime bien dans sa conscience que l’école aussi est une institution pourrie comme le sont les banques ou un commissariat, et donc elle fait tout autant partie de la grande machinerie de ce système et doit être attaquée. Par cette attaque nous voulons aussi rompre avec le discours généralisé des étudiants qui veulent réformer l’irréformable et ainsi se contenter de contribuer à la perpétuation du système, comme l’a déjà dit Theodore Kaczynski, c’est le “tour le plus ingénieux du système”. On ne veut pas dire par ça qu’étudier c’est mal, si quelqu’un veut étudier qu’il étudie, y a toujours eu des gens intéressés par le savoir, de plus avoir des connaissances peut nous donner les armes cognitives pour en finir avec l’idéologie dominante qu’on essaye de nous faire rentrer dans la tête. Le propos c’est plutôt de critiquer l’école comme une contrainte et comme un outil au service du système. Nous voudrions insister sur la contrainte pour tous ceux qui disent “si vous aimez pas le lycée pourquoi vous partez pas ?”, parce que si c’était comme vous le présentez (comme une simple liberté de consommation) ça serait facile, et on se serait tiré de là depuis belle lurette. Or le capitalisme agit comme une contrainte qui englobe toutes nos vies. Qu’est-ce qui se passerait si nous n’allions pas à l’école ? Nous devrions devenir de la main d’œuvre pas chère sans diplômes, travaillant du lever au coucher du soleil sans avoir le temps de connaître nos proches, ou que se passerait-il si nous décidions d’aller vivre dans les bois pour vivre le vieux fantasme hippie ? Il suffirait qu’on se trouve dans un endroit suffisamment intéressant pour le capitalisme pour qu’on nous vire de là à coup de fusil, comme ça se passe de nos jours avec les mapuches, et c’est pour ça que nous ne voulons pas coexister pacifiquement avec le système, que nous aspirons à être partout le bâton dans ses roues,  qui ne lui permet pas d’avancer et qui le détruit.

Nous avons conscience qu’un lycée comme celui-ci, même s’il n’est qu’un engrenage, peut aussi permettre à certaines personnes d’accéder à une vie un peu plus digne, et c’est pour cette raison que nous considérons qu’un acte de sabotage est plus utile qu’un acte de destruction, mais nous préférerions cent fois plus que quelqu’un veuille le détruire plutôt que d’en faire un autel.

Nous voudrions aussi dire ce que l’on pense de sortir faire la fête*. Le système t’offre deux options : ou bien t’es un gros bosseur, c’est à dire un futur contributeur de ce système, ou bien si tu n’as pas les capacités ou que t’as la flemme, on te donne la possibilité de concentrer ton énergie pour faire la fête, où de toute façon tu finiras par contribuer au système. Ainsi nous appelons à être sérieux, à se préparer et attaquer, et c’est pour ça que nous refusons la pose hypocrite de l’inadapté fêtard qui n’a en rien une attitude rebelle ou anti-système.

Nous savons que malgré tout ce que représente l’école, il y a des profs qui contre toutes les limites que le système impose, essaient de faire du lycée quelque chose de plus supportable, essayant de ne pas se résigner à leur rôle de prof, et nous avons beaucoup de respect envers eux. Mais il y a aussi tous ces inspecteurs, professeurs et directeurs qui croient avoir l’autorité suprême, nous humiliant et nous mettant de sales notes comme si il n’y avait pas de conséquence alors qu’en réalité ils jouent avec notre futur, se comportant comme des juges ou des procureurs. Nous leur rappelons que malgré notre jeune âge nous savons reconnaître ceux qui nous font du mal et saurons appliquer notre justice. Ça serait dommage que la prochaine bombe explose dans vos voitures ou vos maisons, ainsi nous vous mettons en garde.

Si je crois en la justice ? Non. Ce que tu comprends par justice n’est qu’une contradiction vivante (et des pires) : tu dis que la “justice” c’est ce qui nous maintient sain et sauf en temps que société civilisée, mais c’est cette même justice dont tu me parles qui est responsable de toutes les guerres … tu connais la phrase  “œil pour œil dent pour dent ” (…) Le soi disant juste est injuste, le soi disant bien est mal, tout dépend d’où tu le vois. Ma façon de résoudre les problèmes c’est un duel, à mort si c’est nécessaire, avec mes ennemis. De toute façon je serai toujours celui qui résoudra mes problèmes, c’est ce qui m’incombe en tant qu’individu autonome. Je ne paierai jamais de gros bras pour résoudre mes problèmes. Ce système mercenaire c’est celui des matons et pas le mien. Que ce soit des matons, soldat, flics, personne ne leur enlèvera leur rôle de sbires ”.
Un-e de l’entropía

À la veille d’un nouveau 11 septembre nous voudrions nous souvenir de tous ceux qui sont tombés en action directe, et rappeler que dans ce lycée comme dans tant d’autres il y a eu des personnes qui ont lutté face à l’ennemi, laissant la peur de côté. Que malgré toutes les fausses possibilités pour se rebeller qui se présentent à nous (mais qui ne sont qu’une façon de nous canaliser et contrôler la révolte) il y a toujours eu un autre choix  : celui d’attaquer, celui de ne pas attendre le bon moment qui n’arrivera jamais si nous ne le construisons pas, celui de reprendre notre vie en main et d’en faire un défi contre le pouvoir, ce choix que beaucoup portent et ont porté en eux et que le pouvoir s’est appliqué à cacher : le choix qui existe encore et que certains continuent de faire, et pour le faire il n’ y a pas besoin de faire partie d’un collectif ou un parti, il faut juste avoir envie, perdre la peur et passer à l’offensive.

Pour tout cela nous saluons ceux qui ont fait ce choix, notre tendresse la plus sincère et une bise pour vous tous. Ça va aussi pour ceux qui ont souffert et souffrent des conséquences de tout ça, pour vous : soyez tranquilles, nous nous sommes nourris de vos expériences et courage, nous serons la jeunesse qui va en finir avec cette merde.

Liberté pour tous les prisonniers du monde, qu’ils soient enfermés derrière les grilles ou en dehors.

Beaucoup de force pour les mapuches qui sont en lutte contre le capitalisme !

Multiplions les noyaux d’action !

Vive l’internationalisme de la FAI-FRI !

Ainsi je pense qu’un rebelle devient un guerrier lorsqu’il est capable de se relever bien qu’il soit tombé de très haut, lorsqu’il est capable de faire face à la réalité. Un guerrier ne doit pas forcément savoir fabriquer une bombe ou la manipuler, il n’a pas non plus à connaître des techniques de camouflage ou savoir comment tirer sur les flics, ce sont des choses qu’on apprend en complément. Les guerriers sont dangereux pour leurs idées et principes, parce qu’ils vont jusqu’au bout, toujours debout, inébranlables, parce qu’ils ne se trahissent pas eux-mêmes, ni leurs compagnons, parce qu’ils sont toujours sur le qui vive, parce qu’ils n’écoutent pas les rumeurs ou les commérages, parce que s’ils ont un problème ils l’affrontent, parce que s’ils sont tristes ils pleurent, et s’ils sont heureux ils rient, parce que s’ils ont la rage ils explosent, parce qu’ils savent mener une vie pleine, mais pas tranquille pour autant. C’est ça les vrais guerriers”
Luciano Pitronello – Ex-prisonnier insurrectionnaliste

PS: on aimerait parler face à face de plein de thèmes dont on n’a pas pu parler, parce que nous savons qu’un texte comme celui-ci ne peut pas contenir tout ce que nous voudrions dire, c’est pour ça que nous demandons que ce texte ne soit pas juste lu, et que vous tiriez vous-même vos propres conclusions. N’attends pas de nous qu’on te donne toutes les réponses, nous pouvons seulement donner quelques indices sur ce que nous ne sommes pas et que nous ne voulons pas être.

L’insurrection c’est aussi valoriser la remise en question elle-même”.

Enfants mutilés par l’éducation, en affinité avec la FAI-FRI
Septembre 2013

*en espagnol du Chili carretear c’est faire la fête

hommodolars

Actes de solidarité depuis le Chili avec les compas séquestré-e-s en Espagne

img00207

Rassemblement solidaire avec Mónica et Francisco

En face de l’ambassade espagnole au Chili, à 13h ce samedi, une vingtaine de compas se sont réunies avec des banderoles et des slogans pour la libération de Mónica et Francisco, prisonnier-e-s de l’État espagnol.

Au préalable nous avons tous eu droit à un contrôle d’identité et à une fouille de nos affaires. Un contingent trois fois plus nombreux que nous nous a reçu, avec un bus, un tank lance gaz, un canon à eau, trois paniers à salade, en plus de flics à motos. Lorsque nous sommes partis les flics anti-émeutes sont arrivés pour nous prendre les banderoles et après en avoir reçu l’ordre ils se sont rué sur nous pour nous arrêter. Quatorze personnes ont été arrêtées, amenées au 19° commissariat et ensuite transférées au 33° comico de Nuñoa, “parce qu’il y a des cellules”. Trois compagnons se sont fait tabasser et un a été renversé par un flic à moto, heureusement sans être gravement blessé. À 19h ils ont été libéré-e-s avec une amende pour infraction à la loi de circulation. Un compagnon est resté en détention pour avoir des antécédents et il a été amené dimanche au centre de justice. Nous nous tiendrons au courant, le plus probable c’est qu’il soit remis en liberté.

Avec tout cet étalage du pouvoir et sa répression disproportionnée ils ne font que confirmer que tout ça n’est qu’un spectacle et qu’en plus notre complicité dans la rue et notre boycott de la manipulation médiatique qu’ils veulent imposer les dérangent. Mais ils ont raté leur coup parce qu’ils n’ont fait que renforcer nos liens fraternels.

Parce que la solidarité est notre nature, qui s’exprime de mille façons. Parce que la solidarité est notre arme et vit dans la rue.

Solidarité et liberté pour Mónica Caballero et Francisco Solar

——————————————————————-

salidasoliespMVI_3710

Solidarité internationale, action directe depuis le campus Juan Gomez Millas

Le vendredi 15 novembre nous avons réalisé une action de solidarité internationale avec les compagnon-ne-s arrêté-e-s en Espagne, accusé-e-s de placement d’engins explosifs. Deux d’entre eux/elles, Monica Caballero y Francisco Solar, avaient été impliqué-e-s dans le Caso Bombas. Nous ne parlerons pas de culpabilité ni d’innocence, mais nous voulons préciser qu’au delà de ces dénominations que nous impose l’État pour nous déclarer légaux, illégaux, nous nous revendiquons en confrontation avec cet ordre de domination, d’exploitation et de soumission. On parle de montage, ce qui ne nous étonnerait pas, mais nous ne tomberons pas dans cette victimisation, mais nous envoyons une bise à ceux/celles frappé-e-s par le pouvoir de quelque forme que ce soit. Nous sommes coupables d’être vivants et d’avoir du sang dans les veines, et même si ça leur fait mal, nous sommes coupables de changer cette réalité et de subvertir cet ordre dans la joie et la haine.

Ça nous fait rire que les puissants essaient de comprendre ce qui se passe au niveau international comme si tout devait répondre à des normes et des lois, essayant d’élaborer d’énormes réseaux ou des hiérarchies qu’ils pourraient désarticuler d’une façon ou d’une autre. Mais qu’ils comprennent bien ceci, nous ne sommes pas des réseaux de trafiquant de drogues, nous ne sommes pas une organisation illégale ni nationale ni internationale, nous ne sommes pas comme les institutions corrompues et sales dans lesquelles vous travaillez. La grande organisation internationale que nous avons c’est celle de ceux qui ont la certitude que cet ordre est de la merde, que le capital et l’État nous volent nos vies et forces, qu’il suffit que les gamins voient la vie de misère qu’ils ont devant eux pour devenir rebelles. La seule organisation internationale que nous avons c’est la vie qui refuse de perdre sa liberté

De même nous n’oublierons pas les rebelles qui ont été emprisonné-e-s et assassiné-e-s par l’État et ses forces répressives. Nous n’oublions pas que le 12 novembre 2002 Alex Lemun a été assassiné, et qu’il a indomptablement résisté pendant 5 jours avec une balle dans la tête. Nous n’oublions pas Hans Niemeyer qui est emprisonné pour l’attaque de la banque BCI, nous n’oublions pas Marcelo Villaroel, Juan Aliste Vega et Freddy Fuentevilla accusés de la mort du flic Moyano. Nous n’oublions pas Celestino Córdova, accusé de l’attaque incendiaire qui a coûté la vie des répugnants propriétaires terriens Luchsinger-Mackay. Enfin nous envoyons notre soutien et tendresse à Ilya Eduardovich Romanov, compagnon anarchiste russe qui a été blessé après avoir manipulé un engin explosif le 26 octobre dernier.

Quant à notre action, nous avons fait une attaque coordonnée par les deux sorties du campus Juan Gómez Millas, c’est à dire, celle qui donne sur l’avenue Grecia et celle qui donne sur Ignacio Carrera Pinto. Le résultat a été l’incertitude des flics, qui ne sachant pas quoi faire ont mobilisé un grand contingent policier. Ce qui a donné lieu à un affrontement de plus d’une heure et demie où les bâtards courraient dans tous les sens sans savoir où on était. Cependant nous reconnaissons que ce genre d’action n’a rien de nouveau et nous appelons à multiplier le moyens, formes et contenus.

Solidarité insurgée et anarchiste avec les prisonnier-e-s politiques

Courage à Monica et Francisco et les autres arrêté-e-s en Espagne

Nous envoyons une grosse bise à Hans Niemeyer et Celestino Córdova

Toute la chaleur de la révolte pour Ilya Eduardovich Romanov

Publicación Refractario


Nous ne voulons pas être des étudiants, nous sommes des délinquants

salvajesPrologue

Ceci est un pamphlet. Ce n’est pas un livre, ni un petit livre, ni un cahier, ni un petit cahier, c’est un pamphlet. Il ne prétend pas, loin de là, être objectif, ni créer le consensus.

Ses prétentions sont beaucoup plus grandes, ainsi nous ne comprenons pas pourquoi nous devons faire les modestes quand nous pouvons aspirer à ce qu’il y a de mieux. Qu’est-ce que nous voulons dire par ce qu’il y a de mieux ? Nous ne voulons pas avoir de limites. Nous ne savons pas si nous en avons ou pas, mais ceci n’est précisément pas la question, car nous ne DÉSIRONS pas avoir de limites, nous voulons nous déchaîner. Ce qui nous importe c’est nous. Nous nous inquiétons des obstacles et des ennemis dans la mesure où ils nous empêchent de faire ce que nous voulons ou d’obtenir ce dont nous avons besoin. S’ils ne nous gênent pas ils n’existent pas. Et s’ils gênent, ils doivent arrêter d’exister. Nous avons passé suffisamment de temps à méditer, à réfléchir sur l’ennemi, le Système, le Capital, etc.

Nous croyons que c’est enfin le moment de nous occuper de nous-mêmes. Qu’est-ce qui nous plaît ? Ne nous plaît pas ? Que voulons-nous ? Ne voulons pas ? Quels sont nos vrais désirs ?

C’est vers ça que nous allons. C’est notre objectif, et nous sommes prêts à aller vers cette direction, et partout ailleurs.

Nous avons les conditions pour que ce qui existe déjà dans l’idée voie le jour et existe réellement.

Comme le disaient certains étudiants de la préhistoire du mouvement étudiant dans les années 60, les étudiants sont une classe en eux-mêmes. Nous ne sommes pas salariés, bien que pour la majorité d’entre nous nous sommes destinés à l’être ; nous ne sommes pas non plus dirigeants, comme peu d’entre nous sont destinés à l’être. Nous sommes nulle part, nous sommes encore en transition, en construction. Nous ne voulons pas dire que nous sommes à l’abri de la merde du Système, mais nous disons que nous sommes dans les conditions matérielles, concrètes, pour nous révolter, nous retourner contre tout ce qui ne nous plaît pas et pour tout ce qui nous plaît.

* * *

Nous ne possédons rien, rien n’est à nous. Nous n’avons ni notre propre maison, ni voiture, ni famille, ni enfants à charge, ainsi on ne peut pas nous avoir en nous disant qu’on fait partie de la classe privilégiée, parce que nous n’avons rien à garder. Il nous reste encore tout à avoir.

Tout est devant nous. C’est le premier point dont nous devons prendre conscience : nous n’avons rien à perdre. Si nous faisons une grève, on ne va pas nous virer de notre travail, et on ne va pas arrêter de percevoir un salaire, et on ne va pas non plus perdre de stupides « conquêtes sociales » avec lesquelles ils ont réussi à tromper nos parents. Si nous faisons grève, non seulement nous n’allons rien perdre, mais nous allons gagner beaucoup de choses, nous allons nous réapproprier un jour d’ennui, et nous allons en faire un jour de vie réelle, de vie intense dans laquelle nous allons faire à chaque instant ce qui nous plaît et non pas ce qui correspond à notre rôle d’étudiant. Profitant du plaisir de l’instant subversif.

Qu’on ne se foute pas de nous, la seule chose qui peut vraiment se perdre c’est la peur. Ce n’est pas tant la peur de potentielles représailles des diverses autorités – professeurs, parents, …- ni la peur de la punition sociale parce que tu n’agis pas selon les attentes imputées à ton rôle. C’est la peur de soi-même, la peur de ne pas savoir quoi faire lorsque personne ne nous dirige et nous dicte notre conduite. La peur de ne pas savoir jusqu’où aller lorsque personne ne nous montre la voie, la peur de ne pas savoir quoi faire à chaque instant. La peur de vivre sans maîtres. La peur de l’incertitude.

Nous allons vous confier un secret : nous aussi nous avons peur ! Et même, nous croyons qu’une bonne part de notre force se base sur cette peur. Nous ne voulons pas que ça soit évident, nous ne voulons pas avoir le chemin balisé ni une lumière au bout du tunnel vers laquelle nous diriger en somnambules. Nous voulons construire notre vie au jour le jour, et par conséquent, affronter la peur de vivre sans maîtres. Nous avons peur, c’est vrai, et l’incertitude nous ronge, mais cette incertitude fait aussi que ça nous donne envie et nous met en ébullition.

Vous n’êtes pas attirés par l’idée de faire l’expérience d’une vie nouvelle et d’abandonner cette expérience médiocre ? Alors expérimentez, faites ce que vous voulez, faisons ce que nous voulons, nous ne saurons pas ce que c’est jusqu’à ce que nous l’expérimentions, et même ainsi nous ne pourrons pas prétendre le savoir, car à chaque moment nous découvrirons de nouvelles choses. Nous n’avons besoin de rien de plus. Nous voulons avancer. Vers où ? Nous ne le savons pas. LÀ-BAS, par exemple, nous savons en tout cas que nous ne voulons pas être ici. N’importe quoi à part ça, nous sommes fatigués, ce monde nous ennuie, il ne satisfait pas nos besoins et nos désirs, il ne nous plaît pas et nous ne nous amuse pas. Mais nous voulons plus, nous voulons une vie meilleure.

Qu’on ne nous trompe pas non plus au sujet de notre avenir. Nous ne sommes pas le futur et nous n’avons pas non plus un bel avenir devant nous. Nous n’avons pas envie d’accepter le futur, avoir un futur c’est s’écrire une mort, écrire le roman de ta vie avant de la vivre : tu fais juste ce qui est DÉJÀ écrit et tu ne construis pas ta vie au jour le jour. Et aussi nous n’acceptons pas le futur parce que DÉJÀ nous n’acceptons pas le présent misérable qui est là et nous n’acceptons pas non plus le futur de merde qu’on nous prépare. Cette vie est misérable !

Nous sommes conscients malgré tout de notre situation dans le monde. Nous sommes conscients que nous sommes ici pour être de futurs travailleurs, nous savons que nous avons un rôle à jouer dans ce monde, celui d’étudiants, celui de gens qui apprennent à avaler la merde, la merde de la Réalité. Celui de gens qui s’appliquent à apprendre l’idéologie qu’insufflent les intellectuels du Système à travers la culture, de gens qui apprennent à réduire leur corps et leur tête à des espaces et des horaires rigides pour arriver dans le monde du travail avec le corps et la tête déjà réduits. Nous sommes conscients que nous sommes des Étudiants.

Mais nous sommes conscients que nous ne voulons plus l’être. Nous ne voulons pas nous habituer à des horaires et des espaces, nous ne voulons pas avaler de la merde, nous ne voulons pas apprendre leur idéologie, ni aucune idéologie. Plus d’intellectuels, plus de culture, plus d’art. Nous voulons aussi arrêter d’être étudiants. Mais nous ne voulons pas arrêter d’être des étudiants pour devenir des travailleurs ou autre chose. Nous ne voulons pas quitter un rôle pour en embrasser un autre. Nous ne voulons aucun rôle, nous ne voulons pas être rien, nous voulons être ce dont nous avons envie à chaque instant. À chaque instant. Nous, étudiants, devons commencer à arrêter de nous cramponner à des idéologies et pensées créées, des choses DÉJÀ faites auxquelles nous nous accrochons à cause de cette peur de vivre sans maîtres, à construire chacun sa vie à chaque instant.

C’est le moment de se jeter à l’eau, d’abandonner toutes les croyances et illusions qui nous garantissent la sécurité de vivre dans ce monde. La sécurité dans cette société n’est pas plus qu’une barrière qui nous protège de … de quoi ? Vous êtes-vous déjà demandé de quoi nous protège la Sécurité qu’on nous offre ? De quoi devons-nous avoir peur ? Les sécurités nous protègent de nous-mêmes, c’est nous que les barrières ne laissent pas sortir, et non les autres qui peuvent aller et venir. Ils ne nous permettent pas de dépasser ce qui est permis. C’est notre propre police qui nous surveille lors de nos arrestations à domicile.

Tu pourris de l’intérieur, tu t’endors et tu t’ennuies, avec l’assurance que tu vas continuer à vivre, c’est-à-dire, que ton cœur va continuer de battre. Et le reste ? Les rêves ? Les désirs ? Les émotions ? La passion ?

Tout cela est là, de l’autre côté de la barrière. Abandonnez la sécurité, la seule chose qu’elle fait c’est enchaîner, et lancez-vous dans l’expérience palpitante de vivre sans normes, sans maître, sans rôle. Expérimentez. Nous voulons vivre et expérimenter MAINTENANT, pas à court ou à long terme.

L’idée de la révolution comme processus est très bien, mais nous ne pouvons plus attendre. Nous avons besoin d’améliorer notre vie, nous voulons qu’elle ait une forme plus intense, et pour ça nous voulons lui créer des moments où elle s’épanouira. Nous voulons des insurrections, des soulèvements, des révoltes, la tension du conflit ouvert. Ça ne nous suffit pas d’avoir simplement le rêve d’une révolution, nous préférons le rêve et l’utopie d’un moment d’insurrection. Le soulèvement est une réappropriation, une vraie rupture avec la monotonie de la vie quotidienne, avec les normes sociales, et avec les rôles qu’à chaque moment de la vie nous devons adopter. Le moment de soulèvement rompt avec les horaires. Le temps arrête d’être une tyrannie linéaire, pour devenir un désordre de moments vécus intensément. Nous savons qu’une insurrection ne va pas changer le monde, mais nous croyons qu’elle peut transformer notre vie.

Parce qu’il s’agit de changer le monde, mais aussi de transformer la vie. Nous ne sommes intéressés par aucune révolution qui n’élève notre qualité de vie. Nous ne sommes pas intéressés par un monde, aussi libre et juste qu’il soit, si la vie est tout autant ennuyeuse, monotone, rationnelle et médiocre que celle que nous vivons maintenant. Plaidons pour créer la révolution qui ne triomphe jamais. Nous ne voulons pas triompher. Nous ne voulons pas perdre le rêve et l’utopie. Les choses qui ont une fin ne nous intéressent pas, ni les choses dont le destin annoncé est de mourir. Nous ne voulons pas avoir de futur, nous fabriquerons notre vie au fur et à mesure. Nous ne voulons pas nous définir maintenant, nos actes nous définiront en temps voulu. Nous ne voulons pas que tout soit clair, nous nous expliquerons au fil de la pratique.

Les choses ne sont pas claires pour nous. Mais ATTENTION, ça ne veut pas dire que nous allons permettre à des intellos de nous éclairer et de nous dire qui nous sommes et ce que nous voulons et ce que nous ne voulons pas. Nous n’admettrons pas d’avant-garde révolutionnaire qui vienne chapeauter notre révolte avec leurs idéologies. Et nous n’allons pas non plus faire la place aux leaders syndicaux ni aux syndicats eux-mêmes. Nous n’allons pas vous laisser faire, nous vous prévenons, nous n’allons permettre aucune tentative de manipulation, et nous n’allons pas permettre que vous récupériez nos luttes pour le système, nous menant sur la voie inoffensive de la démocratie. À bas la démocratie ! Plus de dialogue ! Il faut faire face. Nous vous prévenons, si vous essayez d’étendre vos griffes parmi nous, nous nous jetterons sur vous avec toute notre rage. Mieux encore, nous nous jetterons sur vous, même si vous n’essayez pas d’y mettre vos sales pattes, juste pour ce que vous êtes et ce que vous faites, pour votre fonction de pompiers des feux de la révolte. Récupérateurs de merde, vous êtes dans notre point de mire.

Tout est dans notre point de mire. Rien de ce monde ne vaut la peine d’être sauvé. Les étudiants, nous nous foutons de tout. Nous avons commencé par revenir de la naïveté de la vie moderne, nous ne croyons pas dans la sécurité du foyer rempli de sentiments électrodomestiques, ni dans les machines qui donnent un bonheur pathétique, comme le sourire de l’âne lorsqu’il meurt.

Les voitures ne sont pas plus que le modèle de l’idéal bourgeois du bonheur. Brûlons-les, brisons les vitrines de l’aliénation et de la fausse vie.

Brûler des voitures, briser des vitrines. Ce n’est pas un slogan que nous vous donnons.

Brûler, casser, ce sont nos sentiments que nous vous lançons. Nous vous lançons notre rage, notre colère. Nos désirs et nos rêves. C’est ce que nous pensons. Voilà ce que nous sommes.

Nous nous répandons dans notre environnement telle la lave du volcan. Nous voulons faire irruption, et pas attendre que les fleurs éclosent. Nous voulons briller deux fois plus sans devoir nous résigner à ne durer que la moitié du temps. Nous sommes des utopistes, des rêveurs. Des rêveurs ! Vous avez arrêté de rêver ! Vous êtes devenus grands, vous êtes autant adultes que ces universitaires envahis par l’ennui à vingt ans et quelques. Nous autres nous n’avons jamais arrêté d’être des enfants. Nous sommes toujours sauvages et nous résistons pour ne pas être domestiqués.

Nous mordons. Nous sommes utopistes et sauvages. C’est sûr que vous pensez qu’on est fous, pas vrai ? Ce pamphlet est un virus. Il s’étend et se propage de par le monde sans limites, en tissant des réseaux de désirs subversifs. Tu peux en faire partie. Et même, tu peux l’incarner.

Répands-le, photocopie-le, offre-le aux gens que tu aimes. Crée du rêve.

Des Sauvages
Madrid, décembre 1998

Traduit en mai 2012.