Le Secrétariat des Communications et Transports, les anarchistes et la lutte pour la terre

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Pourquoi avoir attaqué le secrétariat des communications et transports ?
5E : au sujet de nos compagnon.ne.s anarchistes prisonnièr.e.s

Le 5 janvier 2014 les compagnon.ne.s anarchistes Carlos López Martin “El Chivo”, Fallon Poisson et Amélie Pelletier ont été arrêté.e.s dans la ville de Mexico, suspecté.e.s d’être les responsables de l’attaque de l’un des bureaux du Secrétariat des Communications et Transports (SCT). Carlos se trouve dans la prison Reclusorio Oriente et Amélie et Fallon dans le Reclusorio de Santa Martha après avoir terminé une détention préventive de 40 jours et une tentative ratée de les inculper légalement de « terrorisme ». Entre autres pantomimes judiciaires les compagnon.ne.s font face en ce moment à deux procès pénaux : un par la juridiction locale pour les délits d’attaque à la paix publique et dommages aggravés (attaque sur un concessionnaire Nissan) et pour lequel ils/elles ne peuvent pas avoir de liberté sous caution et un autre plus fédéral pour le délit de dommages sur propriété privée (attaque sur le Secrétariat des Communications et Transports) [1].Qu’elles/ils soient coupables ou innocents on s’en fiche, vu que nous avons toujours maintenu une posture irréductible contre les prisons et contre toute influence psychologique et sociale que son existence peut générer. La solidarité avec ceux qui par leurs pensées et actions affrontent ce système de mort et de domination (et même contre vents et marées) c’est ce qui nous intéresse et c’est pour ça qu’on voulait qu’ils/elles sentent notre complicité et fraternité sincère avec leur cause qui est la nôtre. Nous saluons avec fierté leur fermeté pour coopérer le moins possible avec l’autorité et garder bien droite leur dignité anarchique.

Le débat par rapport à la revendication ou non des attaques et sabotages a toujours existé, et de nombreuses actions sont revendiquées à travers des communiqués expliquant les raisons de celles-ci. De nombreux/ses compagnon.ne.s ont affirmé par l’idée de la « propagande par le fait » que les actions doivent s’expliquer d’elles-mêmes et que dans le cas contraire ça devrait être le mouvement lui-même qui devrait chercher à leur attribuer cette objectivité explicative à travers la réflexion et l’analyses de ces actions. En sachant qu’il n’y a pas de communiqué sur cette action nous voulons aborder ici la raison d’un tel acte, essayant ainsi de donner une projectualité à notre lutte libertaire. Évidemment ce que nous pouvons dire à propos de ces faits n’est que notre opinion.

Pourquoi attaquer le SCT ?

Sans aucun doute aucune institution étatique ne mérite un quelconque respect, car elles font toutes partie de ce système complexe social-artificiel de domination, mais ça vaudrait la peine de s’intéresser à ce que cette institution fait pour comprendre pourquoi quelqu’un décide de passer à l’action :

D’après la loi organique de l’administration publique fédérale dans son article 36 le SCT est chargé des fonctions suivantes :

Formuler et mener les politiques et programmes pour le développement du transport et des communications selon les besoins du pays.

Réguler, superviser et surveiller les services publics de courrier, télégraphes et leurs divers services; gérer l’administration des services fédéraux des communications électriques et électroniques et leur liaison avec les services publics similaires attribués aux services privés de téléphone, télégraphes, et sans-fils et avec les services étatiques et étrangers, ainsi que le service public de traitement d’informations à distance.

Attribuer des concessions et permis au préalable de l’avis du Secrétariat de Gouvernement (Mexique), afin d’établir et exploiter les systèmes et services télégraphiques, téléphoniques et de communication sans-fil pour les télécommunications et satellites, de services publics de traitement d’informations à distance, de stations de radio expérimentales, culturelles et d’amateurs et de stations de radiodiffusion commerciales et culturelles; ainsi que surveiller l’aspect technique du fonctionnement de tels systèmes, services et stations.

Réguler et surveiller l’administration des aéroports nationaux, attribuer des permis de construction d’aéroports privés et surveiller leur opération.

Construire les voies ferroviaires, gares et terminaux de caractère fédéral pour l’établissement et l’exploitation du train, et la surveillance technique de leur fonctionnement et opération.

Attribuer des concessions et permis pour l’exploitation de services de transports sur les routes fédérales et surveiller leur fonctionnement et opération, ainsi que l’exécution des dispositions légales respectives.

Construire, reconstruire et conserver les chantier maritimes, portuaires et de dragage, installer la signalétique maritime et fournir les services d’information et sécurité pour la navigation maritime.

Construire et conserver les chemins et ponts fédéraux, y compris les internationaux;,ainsi que les stations et centrales de transport routier fédéral.

Construire des aéroports fédéraux et coopérer avec les gouvernements des États et les autorités municipales, dans la construction et conservation de chantiers de ce genre.

Réguler la construction de chantiers dans la république.

Entre autres choses.

Traduisant du langage légal au langage du pillage et de la destruction.

En prenant en compte les points antérieurs nous pouvons nous rendre compte de comment cette institution fonctionne dans l’édifice capitaliste du Mexique afin de développer le « progrès » technologique et industriel. C’est-à-dire, c’est le lien institutionnel étatique qui travaille pour que les infrastructures communicatives se développent autant dans les zones urbaines que dans les zones rurales et dans d’autres espaces naturels afin de maintenir le flux de la production et des marchandises. Ce qui veut dire qu’ils sont directement responsables de la destruction de la nature et de la consolidation de nouveaux tissus de Pouvoir et d’esclavagisme.

La coupe brutale des arbres, le déplacement et l’assassinat d’animaux et de communautés sont la conséquence de leur attitude pour la construction et le développement des routes par lesquelles se déplacent leurs sales marchandises dans l’intention de générer de juteux profits politiques et économiques. Ce qui a toujours été la raison principale de ces projets de routes, qui dans la plupart des cas sont faits dans la ferme intention de faire avancer les « méga projets » qui ne sont ni plus ni moins que des firmes industrielles – barrages, centrales hydroélectriques, thermoélectriques, mines, parcs éoliens , etc. – dont le système a besoin pour nourrir en énergie son mécanisme vaste et irrationnel de production et de consommation, qui dû aux dommages brutaux que son avancée fait à la nature a besoin de toujours plus de sources d’énergie à exploiter.

Tout en sachant que de tels faits ne se répètent pas uniquement à travers le Mexique mais partout dans le monde, nous allons illustrer certaines choses.

– À Tepoztlán, Morelos, il y a un projet d’extension de l’autoroute de La Pera-Cuautla qui a comme objectif de faciliter les travaux pour la construction du “Plan Integral Morelos” qui consiste en des centrales thermoélectriques et un gazoduc dans la communauté de Huexca, commune de Yecapixtla. Ces projets ont été attribués aux entreprises espagnoles  Abegnoa y Elencor. En mettant en place cette extension ce sont 50400 hectares et diverses sortes de flore et de faune de la région qui seront affectés, en plus de trouer les montagnes de Chalchiteptl, Cematzin, et Yohualtepetl. Ils veulent construire la centrale thermoélectrique sur 45 hectares limitrophes au peuple indigène Huexca, et on évalue qu’elle consommera 24 millions de litres d’eau par jour, et la moitié de cette eau polluée par le chlore et l’acide sulfurique sera reversée dans le fleuve Cuautla.

– Il y a aussi le cas de l’extension de l’autoroute Toluca-Naucalpan afin d’accélérer le flux de marchandises entre secteurs industriels, ce qui rasera une grande partie de la forêt de Agua Otomí-Mexica, qui va de Tequixquiac  jusqu’à Villa del Carbón, et détruira les communautés ñañhú, ñuhú, mazahua et otomí, et provoquera l’extinction et la destruction de centaines d’espèces animales, végétales et de zones humides qui sont déjà en danger de disparition. Tout cela pour permettre à l’entreprise Autoroutes Vanguardia S.A de C.V.  de fructifier.

– La construction d’aéroports qui, comme tous projets urbanistiques, amène destruction et pillage de la terre. Le genre de projets qu’on a vu à Atenco, et qui en ce moment refont surface.

Internet, radios communautaires, courriers : la communication entre les personnes entre les mains de la répression

Si nous savons que les moyens de communication et d’information comme internet, les emails, les portables, etc. ne garantissent pas la sécurité totale à cause des flics autant au niveau national qu’à l’étranger, il faut souligner la récente acquisition de programmes d’espionnage cybernétiques de la part du Parquet Général de la République [2]. Avec l’approbation de la « Loi Telecom » le SCT se remet sur le devant de la scène en tant que responsable de la répression et de la désarticulation de mouvements par l’espionnage d’individus et de groupes gênants ou subversifs à travers internet et les entreprises téléphoniques comme Telmex, par l’écoute des communications personnelles et la surveillance par géolocalisation, ainsi que la suspension de communication et d’information dans des zones de conflit et de résistance, ce qui affectera directement les radios communautaires et pirates et les médias libres et de contre-information qui font office de nœuds de communication au sein des différentes luttes qui ont lieu dans le pays [3].

Ce ne sont pas les raisons qui manquent, le problème c’est le système

Nous n’avons décrit que quelques faits qui démasquent ce qui pour des yeux acritiques ne sont que des simples bâtiments et personnes faisant leur travail administratif. C’est évident que nous ne voulons pas lancer un appel réductionniste contre le SCT qui serait la seule institution étatique à participer à la gestion de la domination. L’intégralité de ce qui compose l’État fonctionne conjointement et coopère dans différentes spécialités pour faire avancer le système capitaliste. Ces institutions sont à leur tour inévitablement menées par un groupe de personnes en haut de la pyramide de la société de classes avides d’argent et de pouvoir. Il n’est pas inutile de mentionner la « maigre faveur » que donne une majorité de la population citoyenniste et démocrate qui vit de façon acritique, sans remettre en question de façon profonde les conséquences du système ou simplement sans un intérêt pour la nature et la liberté et qui ne cherche qu’à faire partie d’une logique de vie basée sur le cycle sans fin du pouvoir actuel : naître-obéir-travailler-consommer-mourir.

Propageons l’action directe et la solidarité pour la défense de la terre.

C’est pourquoi, comme nos compagnon.ne.s Carlos, Amélie et Fallon, nous continuons de penser que l’action directe donne des résultats. Pas seulement pour combattre l’avancée capitaliste mais aussi pour dire à nos compagnon.ne.s prisonnier.e.s que la lutte continue avec solidarité et force. Si nous pouvons nous poser des questions, s’il y a eu des erreurs sur la forme et le moment où s’est déroulée l’action des compagnon.ne.s, il est évident que la voie de la légalité est le piège de l’État pour arrêter les luttes et les dévier vers le réformisme et la passivité. Pendant que les entraves administratives et les procès foutent la trouille à tout le monde, les entreprises destructrices de la nature continuent leur avancée comme prévu.

Nous profitons à nouveau de cet espace pour envoyer un chaleureux salut fraternel libertaire à nos frères/sœurs anarchistes Carlos, Amélie et Fallon, en espérant que cela soit aussi un apport à la lutte. Nous faisons un appel à étendre la projectualité anti-autoritaire dans les communautés de résistance, à trouver des complices, à propager l’action directe et l’autogestion dans les luttes pour la défense de la terre : contre les machines, les institutions, les appareils de la répression, les prisons et toute l’infrastructure que le SCT et tout l’appareil étatique déploient sous notre nez et qui seront toujours vulnérables.

Détruisons les prisons.

Mexique, 20 juillet 2014

Abajo los muros


Notes

1.- Pour plus d’infos en français sur le 5E voir : non fides, brèves du désordre, le chat noir émeutier, sabotage media et la publication Face à face avec l’ennemi

2.- Le parquet s’est équipé du logiciel espion Finfisher, qui a été utilisé au Pakistan et dans les révoltes en Égypte pour désarticuler les résistances.

3.- On ne veut pas dire par là qu’avant cette loi ce genre d’actions du gouvernement ne se faisaient pas, et nous ne rejoignons pas la vision réformiste qui préfère laisser les choses comme elles étaient ou maquiller la violence étatique. Mais nous voyons les avancées de ce genre de lois comme un pas de plus vers la constitution d’un État policier-militaire dont la première étape est la mise en place dans la rue de l’armée et la militarisation de la police, ce qui bien entendu met en danger n’importe quel projet de lutte pour la libération.

 

Lettre de Carlos López “Chivo”

Feu-d-Artifice-002Je débute cette lettre en saluant sincèrement tous/toutes les compagnon·ne·s à l’extérieur de ces murs, en espérant que leurs cœurs battent à l’unisson au rythme de la rébellion et que cela se reflète dans leurs actions quotidiennes.

La semaine dernière j’ai reçu avec beaucoup de plaisir un petit, mais important, geste que les compagnon·ne·s m’ont fait parvenir, en me prévenant auparavant. Au milieu de la monotonie et l’ennui de la vie quotidienne de l’enfermement on attend que « quelque chose » se passe en dehors de l’ordinaire, c’est pour ça que plus ou moins à l’heure dite j’ai fixé le ciel et un salut en forme de feux d’artifice est arrivé. À chaque feux d’artifice qui explosait je pouvais sentir leurs salutations et tendresses. C’était impossible de les voir physiquement, mais je les sentais proche de moi, et j’ai pu me sentir en complicité avec leur solidarité-action, et j’ai même pu imaginer leurs visages souriants et espiègles, se moquant de possibles risques. C’est clair que lorsqu’un-e compagnon·ne est séquestré·e par l’État, la lutte s’étend des deux côtés, intérieurs et extérieurs, des murs. Et de chaque côté chacun·e avec ses moyens se débrouille pour faire des attaques qui peuvent rendre cette lutte plus fonctionnelle (parler d’attaque ne signifie pas pour moi seulement détruire quelque chose de matériel, mais c’est aussi la désobéissance iconoclaste de ce qui est imposé à l’intérieur d’un système).

Ainsi c’est clair que lorsqu’il y a une arrestation ça n’est pas seulement le/la prisonnier·e qui est affecté·e, car selon la dureté du coup reçu, cela peut s’étendre à d’autres compagnon·ne·s qui peuvent vivre la même situation, voir plus dure que le prisonnier·e même.

Donc, alors que je voyais et écoutais les feux d’artifice exploser, je pensais que je voulais partager le bonheur que je ressentais avec d’autres compagnon·ne·s, particulièrement Bruja, Tripa, le Skin, Benja et Justine qui d’une façon ou d’une autre passent un mauvais moment pour avoir été relié·e·s avec le Caso 5E (NdT : le 5 janvier, le jour de son arrestation), affaire dans laquelle Amélie, Fallon et moi sommes accusé·e·s. Profitant de cette lettre je les embrasse à tous les cinq, et à tous/toutes celles/ceux qui au cours de l’enquête ont du supporter les perquisitions et les harcèlements. Pour vous toute ma solidarité, et je redis qu’ici on ne vous oublie pas et on pense toujours à vous ! Vous n’êtes pas seul·e·s, nous ne sommes pas seul·e·s !

En ce qui concerne l’organisation j’ai peu de choses à dire …

En tant que révolutionnaires nous avons besoin d’être toujours en conflit partout où la domination cherche à fixer sa présence dégoûtante, par seulement en prison, mais dans tous les endroits où il y a des rapports de pouvoir et d’autoritarisme. Pour ça y a pas besoin d’être une masse brûlant d’envie de changement. Je crois qu’avec des petits groupes organisés on peut voir des résultats satisfaisants, mais … Que se passe-t-il lorsqu’au lieu de se battre pour être véritablement gênants pour l’ennemi on se plonge dans des querelles personnelles, des polémiques pas constructives et des trahisons entre révolutionnaires ? Le résultat est évident, la division, pas seulement entre groupes, mais entre compagnon·ne·s en affinité, la rupture de projets, la non solidarité des uns pour les autres, on fait sortir le « juge » que certain·e·s ont en eux et on commence à chercher des coupables au sein du mouvement, confusion, etc. Ça contribue évidement à aider l’État à affaiblir quelque chose qui était en train de se développer.

Bien sûr personne ne cherche à être un petit ange et  ne pas faire d’histoires entre compagnon·ne·s, car il y en aura toujours, mais je considère qu’il faut faire ça quand c’est le moment, et s’il le faut ne plus voir la personne et c’est tout, mais pas le faire quand on est dans le pétrin et réduire en poussière les efforts des autres.

Il n’y a pas, comme je l’ai dit avant, de recette magique pour résoudre des problèmes, cependant je pense que la première phase de l’attaque c’est la conscience immédiate.

Parfois je suis assailli par une question, peut-être bête, mais qui me semble logique : pourquoi, si on se dit si contestataires et qu’on ne se tait pas face aux injustices, pourquoi est-ce qu’on le fait entre compagnon·ne·s ? Que ça reste dans la conscience de chacun, mais face à des situations de cette magnitude il y a beaucoup de choses à faire, la restructuration est toujours possible et les projets vont de nouveau de l’avant.

C’est pour ça que je parie toujours sur l’informalité comme organisation concrètement anarchiste, et c’est à travers les tensions, les débats et les approfondissements ( du personnel et des problématiques sociales) que nous nous identifions avec nos affinités, c’est à dire, avec les personnes avec qui nous obtiendrons la connaissance mutuelle et probablement avec qui nous réaliserons certains projets. Ça me semble très compliqué de faire des choses avec des personnes avec qui on n’a pas d’affinité. Une amie m’a demandé une fois comment on mesure l’affinité. Je lui ai répondu que plus on se connaît mutuellement, plus on se fait confiance, et plus on fait d’actions ensemble, et ainsi plus on a d’affinité.

J’en profite aussi pour envoyer un salut fraternel au groupe de Mexicali, pour le soutien reçu. Allez les gars/meufs !

C’est tout pour le moment, en espérant être en contact avec plusieurs d’entre vous (je souhaiterais que ce soit avec tous mais c’est pas possible) et j’envoie des bises à tous/toutes.

Guerre sociale pour toujours !
Vivons l’Anarchie !

Carlos López “Chivo”
1er juillet

Source

Pour plus d’infos sur cette affaire  :

Non Fides
Brèves du désordre
Le chat noir émeutier
Sabotage Média

Des attaques pour réchauffer l’hiver de Santiago

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Une explosion sur le commissariat de Lo Prado

À l’aube du 11 juillet des anonymes ont installé un engin explosif sur l’un des nombreux repaires policiers qui occupent la ville.

Cette fois c’est le commissariat 44 de Lo Prado, sur l’avenue San Pablo, qui a été l’objet d’une attaque explosive qui a détoné sur la porte située à l’arrière du bâtiment.

L’engin serait composé de trinitrotoluène (TNT) placé à l’intérieur d’un objet métallique qui en explosant a endommagé la porte du commissariat, la structure métallique, la partie du mur et les vitres contiguës, sans blesser personne.

Le GOPE (Groupe d’Opérations Spéciales) et le LABOCAR ( la police scientifique) sont arrivés sur les lieux pour ratisser le secteur, sans trouver de revendications quelconques pour l’action.

source


Une attaque sur le supermarché des flics

Au cours de la nuit du 30 juin, en plein centre de Santiago, sur la rue Mac Iver, entre les rues Huerfanos et Agustinas, plusieurs engins incendiaires ont été posés à la Coopercarab, le supermarché des flics.
D’après ces mêmes flics, une bouteille de liquide inflammable a été allumée par un retardateur chimique, causant quelques dommages au niveau des cabines d’essayages du rez de chaussée.

Quelques heures après la fermeture, à 21h, un engin a explosé et le gardien du local s’est brûlé les mains en tentant d’éteindre le départ d’incendie.

Le GOPE dépêché sur les lieux a alors détecté un second engin incendiaire dans les cabines d’essayage des femmes, qu’ils ont désactivé avant qu’il ne se déclenche.

La police n’aurait trouvé aucune revendication sur place et pour l’instant il n’y a pas eu de déclarations s’attribuant l’attaque, qui a eu lieu peu de jours avant le verdict pour le procès du Caso Security.

source


 Salida du Cordón Macul contre le mondial de foot

[Ndt : Le 27 juin, vers 14h, à la veille du match Chili/Brésil, une trentaine d’encapuchadxs ont fait un match un peu différent face à une équipe en uniforme vert, à l’université de l’Ex-pedagógico.]

En raison du contexte politique généré par le mondial de foot au Brésil, le Cordón Macul ressort dans la rue afin d’établir, par l’affrontement direct avec les forces policières, une forme de geste de solidarité de classe avec les prolétaires, indigènes, personnes assassinées, torturées, harcelées et opprimées du Brésil. Ce pays veut que se déroule normalement ce que nous appelons le spectacle maximal de la société capitaliste, développant et étalant son pouvoir pour ainsi faire gagner du fric au Capital. Du pain et du cirque pour maintenir l’ordre et la paix sociale imposée !

Nous rejetons ce spectacle qui cherche à maquiller et camoufler la misère et les contradictions de classe, qui massacre ceux qui s’opposent à la domination bourgeoise, mettant en évidence son monopole de la violence. Nous serons contre chacune de leurs fêtes, nous n’avons rien à célébrer !

Que la lutte se propage dans chaque población, lycée, université, à chaque instant !

 CONTRE TOUTE FORME DE DOMINATION !

SABOTONS LES FÊTES ET CÉLÉBRATIONS DE LA BOURGEOISIE QUI REPRODUISENT ENCORE PLUS DE MISÈRE !

Cordón Macul : jeunesse combattante, insurrection permanente !

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[Tandis que l’hystérie du mondial s’empare des masses obéissantes, nous sortons dans la rue pour propager le feu de la révolte.

Nous refusons de faire partie de ce système de merde et de contribuer au délire patriotique quotidien. Nous n’avons pas de patrie, et nous nous torchons avec leur drapeau.

Feu à la prison, au pouvoir et au drapeau !]

hommodolars

 

La prison et son autre monde

libres

Introduction

C’est la galère
un prisonnier du COC.

On dit qu’un bon texte commence toujours par une bonne citation, et quoi de mieux que celle qui est au-dessus pour dire tout ce qu’il y a à dire sur la taule, la cabane, le gnouf : la prison.
Crainte par certains, et pourtant aimée par d’autres ; par ça je ne fais pas référence à la division entre inclus, auto-exclus et exclus, mais à la société elle-même. La société qui parfois aime sa prison, la nourrit : la prison de la vie. Mais dans ce cas lorsque je parle de prison je veux évoquer plus précisément la prison comme élément de coercition et son utilisation comme centre d’extermination dans la société du capital. On pourrait dire sans crainte d’être contredit que personne n’aime la prison ; mais presque toujours la réalité contredit cet argument, et nous montre la brutalité de cette vie. Et comme dans la société, dans cet autre sous-monde l’élément coercitif a fait que de nombreux prisonniers préfèrent vivre en prison plutôt que dans la rue, à un tel point que lorsqu’ils sortent et voient leurs familles, ils commettent à nouveau des délits dans l’intention de retourner en prison. Ils n’imaginent pas la vie dehors, la société est beaucoup trop agressive pour eux. La prison c’est leur monde, et ils ont appris à y vivre avec plus ou moins de risque.

Ainsi, ce texte ne va pas approfondir sur une analyse politique et philosophique de l’existence de la prison, nous allons à peine l’évoquer. Ça sera plus une description de la vie et de l’organisation coercitive carcérale, construisant les bases pour un débat et une analyse dans laquelle se croisent les idées depuis l’anarchie et les expériences de vie dans la prison.
Il faut prendre ce texte comme un complément de celui que j’ai écrit lorsque j’étais encore en prison et qui s’intitule : Centre d’observation, classification et humiliation ; et dont j’espère qu’il sera bientôt publié. D’autre part, ce texte n’a pas pour but de faire peur, ni d’amener les compagnon·ne·s à prendre des positions plus tièdes dans la lutte de peur de la répression. Et de même je n’essaie pas d’être ni de créer des spécialistes anti-carcéraux ; mais plutôt de contribuer à cette lutte partielle contre les prisons que mènent beaucoup de compagnon·ne·s anarchistes. Ce qui n’a rien à voir avec le fait de demander des améliorations dans le système carcéral ou d’implorer les organisations caritatives d’essayer de faciliter la vie des prisonnier·e·s. Mon objectif est de provoquer le débat et la réflexion sur la base de la description d’une réalité presque cachée, mais qui sévît au quotidien, et qui est nécessairement accompagnée d’analyses politico-philosophiques depuis l’anarchie.

La prison et son autre monde

Il est souvent difficile d’expliquer depuis l’intérieur de la prison comment c’est la vie en prison. Presque personne n’ose le faire. D’une part parce que personne ne veut que sa famille souffre de connaître la brutalité de cette vie. Et d’autre part ce silence se doit à la peur, pas tellement de représailles de la part de ceux qui gèrent le système carcéral, mais la peur de représailles de la part des matons. Et pas toujours de la main de ces derniers, mais de prisonniers laquais des matons.

Lorsque j’étais dans le COC (Centre d’Observation et de Classification) dans le Reclusorio Sur, une nouvelle a choqué les prisonniers. Je me souviens qu’on regardait la télé (qui coûte 150 pesos la semaine), lors qu’est sortie la nouvelle que des prisonniers du Reclusorio Oriente, qui est actuellement le plus violent des trois qui sont dans le district fédéral, avaient filmé avec un portable les matons en train de réaliser leurs rackets quotidiens. La vidéo les montraient se faire payer pour la gamelle et pour recevoir la visite familiale. La nouvelle que les matons et le directeur de la prison avaient été virés avaient plu aux prisonniers qui sentaient qu’au moins il y avait un peu de justice. Je dois dire qu’à moi aussi ça m’a fait sourire ; pas pour l’action du gouvernement contre les matons, mais pour la volonté des prisonniers de briser la glace.

Peu de temps après ils ont transféré dans le Reclusorio Sur l’un des prisonniers qui avait piégé les matons. Il était sous protection, avec deux gardes toujours devant sa cellule, toujours à côté de lui à l’heure de la visite et personne ne pouvait s’en approcher. J’ai donc essayé, au moyen d’une technique de taulard, de lui passer quelques brochures sur la prison et l’anarchie, mais ça s’est avéré impossible. Au fil des jours l’attitude de nombreux prisonniers m’a énervé : celle de toujours le traiter de « cafteur ». Utilisant ce qu’ils avaient appris auprès de leurs camarades matons. Ils le traitaient de cafteur pour avoir filmé les matons en train de racketter les prisonniers et pour avoir témoigné au sujet des rackets. D’autres le traitaient de dégonflé, ce qui revient au même. Cette attitude dégradante fait partie du comportement qui existe entre prisonniers lorsqu’un prisonnier va se plaindre aux matons de ce qu’un autre prisonnier lui a fait, mais les matons la retournent en leur faveur pour se protéger et montrer que celui qui dénonce leurs abus est un cafteur, même si les matons sont des connards. On a beaucoup parlé du cas du prisonnier qui a filmé la vidéo. D’un côté le gouvernement même qui a orchestré tout un show pour se dédouaner et virer le directeur en charge, et certains ont même raconté que c’était par vengeance qu’ils avaient fait ça, parce que la femme d’un des prisonniers était partie avec un maton, etc. Les motifs ne manquent pas, mais ce qui m’a surpris surtout c’est lorsque j’ai compris pourquoi le prisonnier était sous une surveillance stricte. Et cette raison n’est rien d’autre qu’en prévention d’attaques par les prisonniers eux-même. C’est vraiment moche, mais c’est comme ça. Lorsqu’un maton a un problème de cette envergure ce ne sont pas les matons qui vont maltraiter le prisonnier en question, mais les autres prisonniers. Ils lui pourrissent la vie, et parfois ils le tuent. Bien évidement payés par les matons. Mais ce ne sont pas tous les prisonniers qui font ça, mais les êtres qui n’ont plus aucune sortie. Ceux qui doivent accomplir des longues peines, ou bien les drogués au crack ou autres drogues qu’ils font tourner pour quelques 50 ou 100 pesos. Ainsi c’est en partie par peur de ce genre de représailles que de nombreux prisonniers refusent de témoigner sur les abus d’autorité [1] de la part des matons, psychologues, criminologues ou des médecins du service hospitalier. C’est aussi par peur de se faire remarquer, vu que la vie en prison leur serait encore plus difficile face à cette image du prisonnier qui supporte tout d’une manière soumise et ne se rebelle pas, ou comme eux le disent : ne se dégonfle pas.

En prison il y a de nombreux prisonniers qui montent leur petit business et se donnent un rythme de vie à l’intérieur de la prison. En vendant des fruits et légumes, de la bouffe, du cannabis, de l’eau chaude, etc. Une façon plus digne de survivre. Tandis que d’autres simplement par intérêt et par peur de la vie en prison préfèrent travailler avec les matons. Certains percevant les rackets quotidiens, comme les fouilles, et d’autres comme crevards obéissants ou dégonflés (ici je suis d’accord pour utiliser ce terme, pour désigner les crevards de balance) informant les matons lors d’un conflit entre prisonniers, et même, et surtout, de plans de fuite ou de mutinerie. Le système carcéral et sa société ont besoin de forger leurs armes pour survivre et, tout comme à l’extérieur, il y a des résignés et des balances. À l’intérieur c’est clair, d’une part le système profite de la pression exercée sur les prisonniers eux-même pour utiliser ces sources d’information, mais je crois aussi, et je l’ai toujours cru, que peu importe les conditions, chacun a un degré de responsabilité sur ses actes, et donc s’il y a des prisonniers qui copinent avec les matons, même si c’est de façon hypocrite, il y en a aussi qui les détestent, qui s’opposent à eux, et qui préfèrent vivre en mendiant ou en faisant leur petit business plutôt que de se mettre à leur service. Mais malheureusement ils sont rares car la majorité agit selon les circonstances [2]. En plus de ce genre de prisonniers qui montent leur petit business plus ou moins digne pour pouvoir survivre, il y a les riches (la division de classe entre les prisonniers se voit beaucoup plus), les chefs de la mafia, les prisonniers d’autres pays, ceux de familles friquées; ce sont les prisonniers qui contrôlent tout ou une partie du business dans la prison. Des personnes, parfois méprisables, qui arrivent même à faire vivre leur famille à l’extérieur avec l’argent perçu de la vente de drogue dans la prison même [3], ou de racket d’autres prisonniers et de familles d’autres prisonniers. Le texte À couteaux tirés avec l’existant dit ceci : « Rien ne ressemble plus à un représentant de la bourgeoisie qu’un représentant du prolétariat […] Ce qui les rendaient semblables était le fait d’être, justement, des représentants. « .

Et là j’en viens à autre chose. Personne ne peut éviter le racket. Il y a mille façons de se faire racketter. Une femme qui travaillait dans la prison comme technicienne carcérale me disait : les prisonniers sont bien habiles. L’une des façons de racketter c’est à travers la drogue. Devenir accro à une drogue en prison c’est le pire qu’il soit. Les choses les pires que j’ai vu et entendu dans cette courte période c’était à cause des dépendances aux drogues : au crack principalement. Dans de nombreux cas les prisonniers en sont arrivés à vendre ou offrir leur sœurs, copines et jusqu’à leur mère en échange de drogues ou en garantie pour qu’on ne les tue pas. Dans d’autres ils sont obligés de les proposer au chef de la mafia. Une véritable dégradation sociale et spirituel. Le thème des chefs de la prison est un problème parmi d’autres qui est important et qui mérite de s’attarder dessus. Le système pénitentiaire crée aussi ses armes, comme il est dit dans le paragraphe précédent, et sait comme faire en sorte que des prisonniers s’opposent à d’autres pour ainsi perpétuer le contrôle et être tranquille : d’une part c’est à travers leurs organisations caritatives et les petits changements. Détournant ainsi l’attention de ce qui pourrait être à un moment donné le problème immédiat pour beaucoup de prisonniers plus conscients : l’existence de la prison même. Parce que généralement ce sont toujours les prisonniers puissants, chefs de la mafia et ceux à leur service, qui sont affectés par ce genre de réformes qui cherchent le bien être minimal en prison. Et donc ils finissent par rendre responsables d’autres prisonniers, mécontents de ne pas pouvoir mener leur petit business tranquillement, et ils les tabassent. Ce ne sont pas toujours les matons qui sont chargés de remettre de l’ordre, mais ce sont les prisonniers qui se chargent de maintenir l’ordre dans la prison. Un reflet clair d’un point culminant du contrôle social dans la social-démocratie : mettre un flic dans la tête de chacun. Souvent en étant des collabos conscients et d’autres fois par pure opportunisme. Ces prisonniers chefs de la mafia sont souvent responsables du maintien de l’ordre dans les différents couloirs où ils vendent leur drogue, et n’importe quel problème est réglé par eux ou directement rapporté aux matons. Certes ça n’est pas dans tous les cas comme ça, mais en général c’est l’ambiance qui prédomine. Un exemple clair de ça ce sont les diverses mutineries qui ont eu lieu dans le Reclusorio Sur. Ces émeutes n’avaient pas lieu à cause des réclamations régulières des prisonniers : comme la nourriture, le service médical, la révision des dossiers, etc., comme l’avaient dit les médias. Mais elles éclataient parce que le directeur avait refusé qu’on continue d’introduire de la drogue en prison. En bref : parce qu’ils n’avaient plus d’herbe à fumer. La solution a été drastique : une fois qu’ils les avaient maté, les requins (anti-émeutes) sont passés de cellule en cellule en offrant du cannabis aux prisonniers révoltés, et ont garanti que l’introduction de drogue dans la prison allait continuer de se faire en toute normalité.

Le Reclusorio Sur se compose de 9 blocs et huit annexes, plus l’espace du COC, l’entrée, la direction, le service médical, l’usine de sacs, l’école, les courts, le théâtre et le gymnase. Il y a un grand couloir qui passe par tous les blocs et annexes qu’on appelle le kilomètre, et c’est là qu’étaient tous les téléphones publics. Les blocs se divisent de la manière suivante : le D-9 c’est là que sont les malades à vie, les vieux avec diverses maladies, ce bloc est en dehors de la zone de population, juste en face du service médical. Le D-1 est soi disant réservé aux populations vulnérables comme les indigènes, les personnes âgées de plus de 65 ans, les étrangers, mais en général c’est là qu’on vend les cellules aux prisonniers bourgeois ou friqués comme les trafiquants, racketteurs, etc. Le D-2 se divise en deux populations à problèmes mentaux, comme les malades psychiatriques qui ont besoin de drogues médicales, et l’autre partie est pour ceux qui sont en désintox, et ce bloc n’est pas appelé pour rien Océanique. Le D-3 et le D-4, qui sont les mieux, sont pour les primo-délinquants et ceux qui avaient fait des études à l’extérieur ou qui suivaient des cours. Le D-5 c’est là qu’on m’avait envoyé, et c’est là que sont les prisonniers les plus instables, depuis les multi-homicidiaires jusqu’aux dealeurs et kidnappeurs. Le D-6 et le D-7 c’est les blocs qui ont déclenché la mutinerie, ce sont ceux des récidivistes. Ces blocs sont les pires, on y retrouve l’image qu’on voit toujours dans les documentaires sur les prisons au Mexique : sans électricité, sans eau, dégradés, avec une surpopulation, des prisonniers qui dorment accrochés aux barreaux, ou assis sur la cuvette des chiottes, etc. Ensuite il y a le D-8 qui est celui des homosexuels et transsexuels. Dans les annexes il y a les multi-homicidiaires et les multi-récidivistes, ainsi que des prisonniers avec des délits plus graves : racket, séquestration, homicide qualifié, etc. Pour arriver à être dans l’un de ces « appartements », comme le dit la compagnonne Fallon, il faut passer différents examens dans le Centre d’Observation et de Classification, où ils classent les internes pour les envoyer dans les blocs adéquats. Même si souvent les classifications sont mal faites, car elles sont basées sur le rapport de criminologie et de psychologie. Des criminologues et psychologues qui sont chargés d’enfoncer encore plus le prisonnier et de détruire sa stabilité émotionnelle et socio-affective en faisant ressortir chez le prisonnier de la culpabilité pour être en prison, en plus de frustration et repentir de détruire leur famille. Même lorsque le prisonnier n’a pas commis le délit dont on l’accuse, le criminologue se charge toujours de lui faire ressentir une responsabilité pour être en prison, afin qu’il ne rejette pas la faute sur la société et le système. Ce sont aussi ceux chargés de cette réintégration sociale qui n’est rien d’autre qu’une tentative d’adapter les criminels au capitalisme. D’une certaine façon en mettant tout type d’obstacles à la liberté conditionnelle ou avancée du prisonnier. Tandis que d’un autre côté ils savent parfaitement administrer leur travail et comprennent que pour que le capitalisme fonctionne il faut contrôler, et tant qu’on n’arrivera pas au point culminant de l’auto-contrôle mental des masses il faudra toujours des éléments dissidents de la société à travers lesquels  justifier le contrôle policier par exemple.  En  disséquant le système pénitentiaire on se rend compte que les matons sont en fait comme les policiers : une petite entité chargée d’exercer le contrôle à travers la violence et l’intimidation; et qu’ainsi il y en a aussi qui se rebellent contre eux. On voit que les travailleurs sociaux, médecins, mais surtout les criminologues et les psychologues sont ceux qui sont chargés de faire le travail important. En général cette élite dans la société carcérale est privilégiée et protégée, même s’il faut reconnaître que dans des prisons comme le Reclusorio Oriente les prisonniers arrivent à en buter parfois. Le système carcéral tout comme la société a ses structures, et l’attaque doit se faire en groupe et pas de façon isolée. C’est seulement avec la destruction de l’État/Capital que les prisons tomberont, mais pas avec une lutte spécialisée qui ne se concentre à attaquer qu’un seul pilier du système, et encore moins sous la bannière de l’abolition.

La prison que j’ai du vivre est en définitive comme le décrit la compagnonne Fallon dans sa dernière lettre : ça ressemble plutôt à une école. Pas tant pour le lien hypothétique qu’on peut faire entre la prison et l’école, avec ses murs et ses punitions, mais plutôt pour le comportement de la majorité des prisonniers. Ça ressemble à une école à la télé, où on prend tout à moitié au sérieux, même si ce qui est en jeu c’est ta propre vie.
Pour quelqu’un qui serait anarchiste ce genre de vie en prison est souvent difficile (peut-être pas plus difficile que pour le reste des prisonniers), principalement à cause du dilemme moral et étique auquel on fait face lorsqu’on est confronté aux positions de pouvoir qui existent entre les prisonniers. Additionnant à cela tous les efforts que fait le système pour nous détruire. Sachant bien qu’immédiatement il y a deux voies pour survivre : l’illégalité ou la soumission. Mais d’une façon ou d’une autre en collaborant toujours avec le système, parce qu’au final même en faisant nos petits trafics on rentre dans le jeu dans lequel le système carcéral veut qu’on rentre. La décision appartient à chacun, mais c’est souvent difficile. Principalement parce que nous ne voulons pas, et nous nous y opposons, prendre partie pour l’isolement volontaire, qui d’une façon ou d’une autre te dispense de participer à ces relations de pouvoir entre prisonniers que la vie carcérale impose et que certains prisonniers nourrissent avec plaisir, ou en demandant des conditions privilégiées pour ceux qui se déclarent prisonniers politiques. Attitude dégradante qui vient des courants marxistes, utilisant toujours cet avant-gardisme révolutionnaire qui s’applique à marquer la différence avec les prisonniers communs, comme ils les appellent, ou lumpen, et qui sont là précisément pour éduquer ces prisonniers sauvages dépourvus de conscience de classe.
Lorsqu’un anarchiste rentre en prison, il n’est pas toujours aussi naïf, mais même ainsi on croit toujours que c’est un terrain fertile pour semer mutineries et rebellions. Ensuite vient la déception et on se rend compte que même de l’intérieur il y a beaucoup de boulot à faire, car comme au dehors il y en a toujours qui à un moment défendront l’ordre établi. Et qu’en étant dans un sous-monde, avec un espace mille fois plus réduit que dans la société, et diverses conditions qui font que le contrôle est plus important, les possibilités d’auto-organisation paraissent presque nulles, ou alors nécessitent qu’on dépasse ce contrôle, et alors ça devient désespérant. Ce discours que j’essaie d’avoir me fait penser d’une certaine façon aux critiques exprimées par des compagnon·ne·s d’affinité au sujet des migrants en Europe. Parce que c’est vrai que de nombreuses prises de positions viennent de la gauche, et les gauchistes essaient de faire du prisonnier une éternelle victime, tandis qu’ils l’idéalisent et en font un être potentiellement révolutionnaire, pour le simple fait de souffrir des conditions de répression et d’oppression dans lesquelles l’État le soumet. Un argument qui est souvent utilisé par ceux qui à leur tour idéalisent l’illégalité et les illégalistes. Tandis que d’un autre côté, au moment de réaliser une analyse minutieuse nous ne devons pas oublier non plus que ces conditions sont dirigées pour transformer les individus en personnes responsables avec le système, ou bien pour les détruire s’ils sont inutilisables.
Au final je pense toujours la même chose, et c’est que dans n’importe quelle société, aussi pourrie qu’elle soit, et dans n’importe quelle lutte, quand bien même elle pencherait vers l’assimilation et la récupération, il y a des individus qui ne se laissent pas domestiquer, qui remettent en question, qui manipulent, qui attaquent. C’est dans ces moments d’attaque, de rupture et de destruction [4] que même au sein de la prison on peut trouver des affinités avec qui commencer un chemin, un voyage et provoquer l’insurrection ; en définitive, reprendre nos vies en main.

Et pour finir je voudrai rajouter deux citations dédiées à la réflexion sur des modes d’intervention dont je remets en question la validité en ce moment [5], autant pour leur étique que pour la stratégie de lutte qui provient de l’informalité :

« Soulignons tout d’abord les problèmes éthiques liés au moyen employé, au fait de s’en remettre aux hasards de l’acheminement du courrier pour toucher un chien de garde du pouvoir, c’est-à-dire de déléguer à un exploité – avec tous les risques que cela comporte pour sa personne mais surtout au mépris de sa volonté propre – le port d’un engin à domicile, et aux contradictions entre les fins et les moyens qui en découlent. Mais se pose également le problème de s’en prendre souvent aux secrétaires et aux employés, esclaves des grands de ce monde qui ouvrent rarement leur courrier eux-mêmes. On se demandera s’il s’agit bien là de ce qu’on entend par « frapper le pouvoir dans ses hommes et ses structures »…
En juillet, un nouveau colis sera revendiqué avec d’autres attaques en Espagne et en Italie, toutes rassemblées sous le sigle « Solidarité Internationale ». Le communiqué précise qu’il ne s’agit pas d’une avant-garde armée, qu’en suivant quelques principes, chacun peut utiliser le même nom, etc. Mais ce n’est au fond qu’une déclaration d’intention, tant la revendication et la signature en elles-mêmes servent justement à distinguer un geste de révolte des autres, le faisant émerger du marécage de la conflictivité sociale diffuse pour le placer dans une logique qui est en soi politique.
On notera encore au passage que, s’il faisait preuve de volonté de blesser, le colis piégé envoyé à Zuloaga a aussi démontré l’inefficacité de la méthode employée, vu qu’il était presque impossible qu’un de ces colis arrive jamais à son destinataire. Les colis suivants – certains ne contenaient même pas de charge explosive – allaient tomber dans la répétition absurde et dans la recherche d’un effet purement spectaculaire. Ces « attaques » n’existaient que par le ramdam médiatique qu’elles causaient, ce qui ne les empêchera pas d’occuper le haut de l’échelle de la radicalité dans l’imaginaire de certains. Ce mode très particulier eut au moins deux effets nocifs, puisque d’une part il éclipsait toute la variété d’attaques et d’actions directes présentes, et d’autre part il permettait aux bourreaux de passer pour des victimes. Outre qu’ils rentraient dans une logique du contre-pouvoir, les colis piégés lançaient une menace irréelle, et cela les puissants le savaient bien. »

Notes critiques sur la lutte contre le FIES

« Sasha reprit en russe. Il était fier de l’hommage qu’on rendait à ses camarades, dit-il, mais alors, pourquoi y avait-il des anarchistes dans les prisons soviétiques ?
Lénine l’interrompit : « Des anarchistes ? Absurde ! Qui vous a raconté des histoires pareilles et comment avez-vous pu y croire ? Nous avons des bandits en prisons, et des makhnovistes, mais pas d’anarchistes ideiny [ reconnus par le régime comme présentant une théorie politique acceptable].
– Voyez-vous, m’écriai-je, l’Amérique capitaliste divise aussi les anarchistes en deux catégories : les philosophes et les criminels. Les premiers sont acceptés partout, l’un d’entre eux fait même partie du gouvernement de Wilson. Les autres, auxquels nous avons l’honneur d’appartenir, sont emprisonnés et persécutés. Vous faites donc la même, distinction ?  »

Emma Goldman, Vivant ma vie, 1932 [6]

Pour moi la seule consigne de liberté pour les prisonniers et de destruction des prisons c’est la lutte même [7]. La liberté absolue se trouve dans la destruction de l’État capitaliste et de n’importe quel autre qu’on voudrait nous imposer, même si celui-ci camoufle son autoritarisme et sa toute puissance sous la devise du Pouvoir Populaire.

Sans avant-gardes, ni spécialistes, leaders ou dirigeants :
guerre sociale sur tous les fronts !

Mario A. Lopez Hernandez

Depuis un endroit de cet univers chaotique.

Avril 2014


Notes

 1- Par abus d’autorité je fais référence à la perspective que certains prisonniers ont concernant les rackets, coup, punitions et autres exercés par les matons; à aucun moment je n’essaie de justifier une quelconque autorité sans abus ou un bon gouvernement.

2- Dans ce texte je parle du Reclusorio Sur, qui est selon les prisonniers et quelques techniciens, et selon ce que j’ai pu voir, là où il y a le plus de grégarisme des trois Reclusorios présents dans la région de Mexico. On dit que dans le Reclusorio Oriente les prisonniers qui travaillent avec les matons, et les balances, ont un bloc à eux seuls pour les protéger. Tout ce que je dis ici est en rapport direct avec ce que j’ai vécu dans le Reclusorio Sur. Un maton m’a dit qu’on m’avait envoyé dans celui-ci parce que si j’avais été dans le Reclusorio Nord j’aurai pu plus facilement déclencher une mutinerie en étant seul. Et aussi parce que là-bas il y a encore des prisonniers de la guérilla urbaine Liga Communista 23 Septiembre (ils sont seuls dans le module de haute sécurité totalement isolé, et  pour la plupart leurs familles ne savent même pas où ils se trouvent).

3- Pour comprendre ce point, vu qu’il peut y avoir de nombreuses divergences au sujet de l’illégalisme, des appels en dehors de la loi et de l’apologie qui tourne autour, je recommande un article publié dans le numéro 1 de la revue anarchiste À corps perdu et qui a pour titre : Les cendres des légendes – pour en finir avec l’apologie illégaliste. Il sera publié dans le prochain numéro de la revue anarchiste Negación. Je parle de ça vu qu’en général au Mexique certains individus anarchistes font des références passionnées à des secteurs de la société et des milieux sociaux qui agissent en dehors de la loi, par exemple les narcotrafiquants et leurs hommes  de main; arrivant même à faire des allégories sur des attaques contre la police ou l’armée par ces groupes de pouvoir, leur conférant un aspect positif et même voulant les faire passer pour des révolutionnaires uniquement parce que leurs attaques sont spectaculaires, ou bien parce qu’ils agissent en dehors de la loi. Tandis que d’un autre côté on ne mentionne pas les motivations de ces groupes dissidents et de pouvoir.

4- Je précise que lorsque je parle d’attaque et de destruction je me réfère bien entendu d’une part à l’écho physico-matériel de l’attaque et la destruction du système. Mais aussi par attaque et destruction je me réfère à n’importe quel mode ou outil employé pour subvertir l’ordre : des critiques, auto-critiques, des armes, des livres, des explosifs, etc. lorsque ces instruments sont utilisés pour la destruction de l’État sous toutes ses formes.

5- Face à ça j’affirme que je ne méprise pas la lutte ou la valeur d’autres individus ou collectifs qui réalisent ces attaques; j’utilise seulement cette citation parce qu’elle m’a semblé pertinente et il me semble nécessaire de commencer un vrai débat sur la validité et l’efficacité de certains moyens. La citation, même si elle est courte et spécifique au contexte de la lutte contre le FIES, rassemble les bases d’un débat qui doit se développer et s’approfondir. Mais un point que je dois mentionner et qui vaut la peine d’être réfléchi, c’est la reproductibilité des moyens et leur relation avec les paquets. Même s’il faut aussi réfléchir sur le conflit à la première personne et la délégation de l’attaque à un autre individu, généralement pas conscient des motifs de la lutte, ou de ce qu’il transporte. D’autre part, lorsque je fais allusion aux paquets explosifs je fais uniquement référence au milieu anarchiste/libertaire; je dis cela vu qu’au Mexique il y a d’autres groupes (ITS) [NdT : une critique sur ce groupe en anglais ici] qui sont spécialistes de l’envoi de paquets explosifs à des scientifiques, et ces groupes ne sont pas anarchistes ou libertaires et leurs perspectives n’ont rien à voir avec l’idéal anarchiste, même s’ ils se retrouvent dans les modes d’action.

6-  Traductions tirées de À Corps Perdu, n°1 [NdT]

7- Pour la même raison que ce que je dis plus haut; malgré les critiques je ne dévalorise pas le travail que différents groupes réalisent pour soutenir les compas prisonniers,  même si ça n’est pas la lutte que je préfère, elle est quand même nécessaire et c’est une preuve de soutien réel entre anarchistes.

Pour d’autres lettres de Mario López voir ici et ici

Source

Verdict du procès du Caso Security

lienzoafueraveredictoLe 2 juillet Juan, Freddy et Marcelo n’étaient pas présents pour le verdict du procès, refusant d’assister à ce spectacle juridique auquel les proches ne pouvaient assister que par visioconférence.

Le verdict du procès est le suivant :

Juan Aliste : 18 ans pour être le présumé auteur de l’homicide sur Moyano + 10 ans pour la tentative d’homicide sur le flic Abarca + 14 ans pour le braquage de la banque Santander à Valparaíso et la banque Security = 42 ans de prison au total

Freddy Fuentevilla : 5 ans pour être le présumé complice de l’homicide sur Moyano + 3 ans pour être le présumé complice de la tentative d’homicide sur Abarca + 7 ans pour le braquage dans la banque Security = 15 ans de prison au total

Marcelo Villarroel : 14 ans pour le braquage sur la banque Santander de Valparaíso et la banque Security

Publicación Refractario

 

L’anarchiste, à Severino Di Giovanni

severino

La phrase tomba
comme une guillotine
amputant au ciel
la clarté du jour.
Vint la nuit,
l’obscurité se fit,
vint la nuit,
son visage sévère.

Nuit noire
de sombres présages
longue veille
de pensées agitées.

La phrase tomba,
de mort, redoutable,
elle secoua d’un coup
d’une force terrible.
Elle le trouva debout,
presque prêt,
clair dans ses idées.

Ils le fusillèrent juste là-bas,
étouffant son cri de guerre :
vive l’Anarchie !

José Luis Parra, 1979

 

Brève mise à jour concernant des prisonniers au Chili

oiseauLe 5 juin 2014 Victor Montoya, qui avait été emprisonné en février 2013, accusé d’avoir placé une bombe contre un commissariat dans la commune de Las Vizcachas, a été acquitté de toutes les charges qui pesaient contre lui. Il est maintenant dehors.

Le 13 juin 2014 Alfonso Alvial et Hermes González ont été condamnés à 5 ans de liberté surveillée, après avoir passé 6 mois de préventive en section de sécurité maximale, suite à un braquage qui avait mal tourné le 11 décembre 2013, au cours duquel le compagnon Sebastián Oversluij a été tué. Ils ont été condamnés pour vol avec intimidation et port illégal d’armes.

Et enfin,  la « lecture de la sentence » dans le cadre du procès du Caso Security qui se déroule depuis plusieurs semaines aura lieu le 2 juillet 2014.

 

premier mai

— Mis à jour —

À Santiago ce premier mai a été animé …
Il y avait deux parcours de manif : le parcours officiel organisé par le syndicat de la CUT (Centrale Unitaire de Travailleurs) et sa clique de « flics rouges », qui passait devant le Palacio de la Moneda et un autre parcours qui avait comme destination finale la Plaza Brasil et qui était organisé par des mécontents de gauche, tout aussi avariés que la CUT, notamment des orgas mapuches, des orgas de gauche de tout poil et aussi un groupe de personnes réclamant la libération de prisonniers politiques, notamment celle d’Abimael Guzman*.

Le parcours de la CUT était encadré par 350 « flics rouges »de la CUT qui se chargeaient de la sécurité de la manif, en addition aux flics officiels. Et comme des encapuchadxs ont essayé de mettre un peu d’ambiance, la « jota » (JJCC-Jeunesses Communistes) et le s.o. de la CUT ont attaqué les encapuchadxs à l’aide de bâtons … résultat : 13 des guignols de la CUT ou de la jota ont été blessés, certains par des molotovs … est-ce que ça les rendra moins cons et autoritaires ? Certainement pas, mais au moins ça fait plaisir de savoir que les molotovs touchent les bonnes cibles. Neuf flics ont également été blessés et 4 motos de flics cramées. Et il y a malheureusement eu 43 arrestations.

À noter que la CUT et le PC sont de vieux habitués de la répression. En 2013 pour le premier mai ces misérables individus s’en étaient donné à cœur joie pour tabasser des encapuchadxs isolé.e.s.

Du côté du parcours des mécontent.e.s ça a beaucoup bougé sur la place Brasil, avec des affrontements dans les rues avoisinantes et une grosse répression. Des agents de la PDI (Police d’enquête) étaient postés à des fenêtres et balcons de leur bâtiment qui s’était fait attaquer, situé sur la place, et tiraient avec des balles en caoutchouc sur tout ce qui bougeait. On peut en avoir un aperçu ici.

* un péruvien fils de riche qui deviendra prof de philo avant de se convertir au maoïsme et  fonder le Sentier Lumineux, qui provoquera un conflit armée particulièrement sanglant au Pérou dans les années 80 et début 90. Depuis 1992 ils croupit en taule. Et malheureusement au Chili il y a des benêts de gauche voire même des anars qui soutiennent les autoritaires du Sentier Lumineux, entre autres on peu citer une brochure sur les prisonnières du Sentier Lumineux dans la prison de Chorrillos qui a circulé parmi les anars.

—————————————–

À Chicago le premier mai était très différent. Il faut déjà savoir que le premier mai n’est pas férié en Amérique du Nord et n’est pas la fête des travailleurs.

Il y a cependant eu une petite manif dans le centre ville, partant du lieu d’origine des évènements de Haymarket. On peut constater que des organisation réformistes de défense de migrants se sont appropriés cette fête. L’ICIRR (la coalition de l’illinois pour les droits des immigrants et réfugiés, son directeur est membre du PRI, le parti de l’actuel président méxicain) dont les membres étaient vêtus de gilets jaunes avec le nom de leur asso, tenait le rôle de service d’ordre et donc aussi de balance lorsque des anars criaient un peu trop à leur goût. Ces collabos n’ont pas hésité à physiquement arrêter un anar qui dénonçait leur présence dans la manif, et à le remettre entre les mains de la police (il se trouve être un compagnon sans-papier et il est actuellement sous une procédure d’expulsion) afin que leur manif qui avait débuté par des discours réformistes et la Marseillaise comme musique (ça n’est pas une blague), puisse continuer son petit bonhomme de chemin au milieu de slogans pourris et réformards en espagnol et en anglais (« Écoute-nous Obama on est dans la lutte »), le tout sous l’oeil de 3 hélicoptères et d’un nombre incalculable de flics à vélo, à pied et à voiture (les chevaux étaient sur place mais ne sont pas sortis de leurs camions).

Les discours faits à la fin de la manif ont été la cerise sur le gâteau. Que des intervenants apparentés à l’ICIRR ou à des églises, un curé a même fait son petit discours. Tous les discours allaient dans le même sens :
– Obama est un vilain menteur, depuis qu’il est président il y a eu 2 millions de personnes déportées alors qu’il avait promis d’être gentil avec les immigrés
– les immigrés méxicains qui sont des bons et vaillants travailleurs, de bons chrétiens et qui ne sont pas des criminels, méritent de rester sur le territoire étatsunien (mais pas ceux que l’ICIRR balance aux flics)
– l’éternel appel à la Justice
– une emphase sur le sort des enfants immigrés (avec des personnes qui pleuraient presque en parlant au micro)

On peut rajouter que dans les discours y a eu pas mal d’autres trucs craignoss (« grâce à Obama les noirs ont plus de droits et nous les méxicains on a rien »), et que c’est quand même assez gênant de revendiquer des droits pour les immigrés mais de ne parler que des méxicains, alors qu’il y a tout un tas d’autres personnes qui émigrent aux États-Unis (y avait plusieurs drapeaux méxicains dans la manif, et parfois des drapeaux étatsuniens couplés à des drapeaux méxicains).
C’est aussi curieux de ne pas parler des dernières grèves de la faim dans les centres de rétention à travers le pays, et de ne pas manifester devant le centre de rétention de Tricounty plutôt que de se promener dans le centre ville de Chicago.

Et c’est surtout très étrange que cette asso n’ait pas trouvé un autre jour parmi les 364 qu’il reste dans l’année pour déverser son discours réformard et religieux dans la rue et balancer des anars. C’est d’autant plus navrant de voir que les anars présents (certes pas nombreux mais visibles, et au passage c’est toujours très curieux de voir des gens cagoulés dans des manifs mollassonnes) les aient laissé s’accaparer et détourner une telle célébration, et surtout les aient laisser diriger la manif à leur manière autoritaire (lorsque le compagnon était en train de se faire arrêter les pignoufs en jaune de l’ICIRR disaient aux gens qu’il fallait avancer).
Le premier mai est censé commémorer les évènements de Haymarket, qui ont eu lieu dans un contexte de lutte pour de meilleures conditions de travail (ou d’exploitation), entre autres choses la journée de 8 heures, et qui ont abouti à  la pendaison de 4 anarchistes. Dans de nombreux pays c’est la journée des travailleurs (et pourquoi pas des feignasses comme nous), mais de tous, peu importe leur couleur, leur religion, leur pays d’origine, ou n’importe quelle case à laquelle ils s’identifient.

Avec cet exemple on voit encore une fois que tout est prétexte à la classification et séparation des individus aux États-Unis.
On voit aussi avec les exemples du premier mai à Santiago et celui de Chicago que ça ne gêne pas les charognards anti-anarchistes de s’accaparer un évènement qui représente tout ce qu’ils détestent. Et il semble que même à Paris une clique d’autoritaires a voulu faire régner l’ordre et la sécurité.
On peut du coup se demander si tous ces énergumènes savent qu’à Haymarket le 4 mai 1886 une bombe a été balancée sur les flics qui réprimaient la foule de manifestants, provocant la mort de 7 policiers (certains tués après coup lorsque dans la panique ils ont commencé à tirer dans tous les sens, touchant leurs collègues au passage) …

Haymarket_Monument

Un rapport de La Moneda sur l’anarchisme au Chili paru dans la presse

NdT : Nous n’avons pas pour habitude de diffuser des textes issus de médias autoritaires, et encore moins dont la source est un gouvernement, mais ça nous a semblé intéressant de voir comment l’État chilien perçoit l’anarchisme, que ça  fasse bien rigoler de voir combien ils sont à côté de la plaque, ou bien au contraire que leurs analyses et rapports d'(in)intelligence policière inquiètent.

tumblr_m0lfleRCYD1ro0ralo1_500La consolidation d’une nouvelle guérilla urbaine anarchiste, des explications sur l’anti-concertationnisme  et des mises en garde sur le « post-anarchisme anti-citoyen », voilà ce que l’on trouve dans les conclusions finales d’un document de fin de mandat du gouvernement de Sebastián Piñera, réalisé par des analystes de La Moneda (le gouvernement chilien).

Le rapport tente de décrire la situation de l’anarchisme, montrant les différentes tendances, réseaux et projets de ces groupes.

Il contient des fiches d’information sur l’entrée sur le sol chilien de membres du mouvement acrate d’Argentine, Belgique, Espagne, Italie, Brésil, Suisse, France, Mexique, Autriche et Équateur, tous photographiés, mais seulement quelques uns identifiés avec noms et prénoms.

Ceux qui ont droit à une identification complète, comme le nom et les liens avec l’étranger, ce sont quelques 50 individus (de nationalité chilienne) considérés comme les plus actifs.

L’évolution

Ce rapport final résume ce que ses auteurs considèrent comme l’histoire de l’anarchisme moderne au Chili.

Selon les analystes, Marcelo Villarroel Sepúlveda, Juan Aliste Vega et Freddy Fuentevilla Saa sont et seront la référence obligatoire de « l’anarchisme insurrectionnel ».

Ceci parce qu’ils sont les fondateurs du Kolectivo Kamina Libre (en 1996), dont les membres ont préféré rester en prison plutôt que de signer un document du gouvernement en 1997, qui offrait une remise de peine en échange de déclarations de repentir et d’engagement à ne plus continuer sur la voie armée.

Ils ont utilisé le harcèlement constant à travers des grèves de la faim, des attaques de caméras de surveillance, destructions de parloirs, tout en formant parallèlement des réseaux sociaux dans le but de visibiliser leurs actions et ainsi avancer la fin de leurs peines.

Par exemple, ils ont accroché des banderoles avec des anarchistes, sympathisé avec les animalistes (ils sont devenus végétariens et ont arrêté de porter du cuir), ils ont fait des clins d’œil au monde « ancestral », comme remplacer le « c » par le « k » dans leurs écrits, pour que ce soit plus agressif et plus « mapuche ».

Peu de temps avant Villarroel, Rodolfo Retamales et Pablo Morales avaient été expulsés du Mapu-Lautaro à la suite d’une « Grève de Militance », montrant qu’ils ne croyaient pas en un système hiérarchique, mais à une horizontalité des relations. C’est de cette façon qu’ils se sont mis à utiliser des expressions anti-systèmes et ont montré qu’ils n' »exigeaient » pas « être mis en liberté », mais « sortir dans la rue », car pour eux le monde capitaliste est un monde de « domination » et pas de liberté.

L’effort a porté ses fruits : ils ont tendu des ponts avec des anarchistes argentins et ont eu des visites, dans la prison de Haute Sécurité, de la Cruz Negra de Buenos Aires.

Quelques années après « être sorti à la rue », un groupe d’anciens de Kamina Libre ont attaqué la banque Security (2007), où le brigadier Moyano a été tué. Fuentevilla et Villarroel ont été arrêtés en Argentine (2008) où ils avaient un réseau de soutien.

Selon des sources internes du gouvernement, tout ce qui se passe aujourd’hui dans le milieu anarchiste insurrectionnel est en rapport avec Kamina Libre.

Le premier anarchiste pure

C’est à cette branche violente et internationaliste (dans le style grec)  que faisait partie Sebastián Oversluij, tué dans le braquage de la banque Estado en décembre dernier. D’après les analystes, son importance réside dans le fait que c’est le « premier anarchiste pur » (sans un passé de militant « subversif ») qui réalise un braquage.

En rapport avec lui on peut parler de Tamara Farías Vergara, nièce des frères Vergara dont la commémoration a lieu le Jour du Jeune Combattant (29 mars). Elle est aujourd’hui inculpée comme auteure présumée d’une tentative d’homicide sur un garde d’une succursale de la banque Estado le 21 janvier dernier.

Apparemment, la voie choisie par Oversluij serait la conséquence du développement de l' »anarchisme insurrectionnel » suite à l’échec du Caso Bombas.

Cela a généré chez les inculpés et leurs réseaux de soutien une sensation d’impunité, renforçant leur moral. De fait, à ce moment là il y a eu une prolifération d’articles triomphalistes sur internet, augmentant son intérêt.

La FAI/FRI se renforce

Pour les analystes du gouvernement, presque chaque action subversive importante porte le sceau FAI ou FRI, c’est à dire de la Fédération Anarchiste Informelle ou du Front Révolutionnaire International, qui sont utilisés comme mode de communication et de validation des activités insurrectionnelles.

En lien avec ces groupes, le Réseau de Traduction de Contreinformation, où s’échangent des idées, matériels idéologiques, communiqués d’attentats et activités en 13 langues.

Ces jours-ci ce site célèbre des attentats au Brésil, Indonésie, Buenos Aires et Glasgow, et, il y a peu, une attaque en juillet 2013 au Chili d’une succursale de la banque Estado proche de l’Ex-pénitentiaire, en « honneur » à Hans Niemeyer.

Le vrai problème : les attaques post-anarchistes sur les citoyens

L’un des grands problèmes que rencontrent les organismes de sécurité pour lutter contre l’anarchisme c’est qu’il n’y a pas de leaders, c’est à dire que chaque combattant se représente soi-même à travers ses actions, dans une « nouvelle guérilla urbaine nihiliste » (qui ne croit ni dans le bien ni dans le mal, car la morale serait une construction sociale utilisée comme un dispositif de domination).

Par conséquent, se reconnaître dans une organisation internationale ne limite pas ceux qui ne s’y reconnaissent pas, même si ça permet une certaine visibilisation, comme ça a été le cas avec le Front International Révolutionnaire/Commando Insurrectionnel Aracely Romo (qui a réalisé un attentat près des locaux de chaînes de télé contre les « journa-flics » qui ont exposé le corps sans vie de Mauricio Morales) et le Commando 8 décembre, qui s’est attribué des explosions sur trois banques.

Un second problème c’est la radicalisation du post-anarchisme et la politique anti-citoyenne, c’est à dire des attaques contre le citoyen lambda, considéré par les plus extrêmes comme des êtres « soumis », complices de l’État-policier.

Ainsi, il y a eu par exemple des attaques sur des véhicules particuliers (à La Reina) et des menaces sur des écoles, considérées comme « centres de domestication » du foutu citoyen.

En conséquence, les analystes s’attentent à ce qu’il y ait de nouvelles attaques de type incendiaire contre des objets symboliques du « citoyen inconscient », comme des sapins de noël (ce qui a eu lieu à deux reprises à Estación Central en 2012 et 2013, et une fois à Hualqui en 2013).

Anti-concertationnisme

D’après le rapport,  l’anarchisme méprise  l’Alliance pour le Chili (une coalition politique de droite), mais il en est de même pour l’ancienne Concertation et ce mépris pourrait même être dirigé contre le PC lorsque celui-ci est rentré dans la Nouvelle Majorité.

Même le gouvernement de l’ancienne URSS est vu par certains comme un « capitalisme d’État » et comme une forme de domination.

Et même si la cible préférée des bombes durant le gouvernement de Bachelet et de son successeur a été le système bancaire, on affirme que « l’anti-concertationnisme » anarchiste pourrait devenir important. Ainsi en 2013 l’actuelle présidente s’est fait cracher au visage en pleine campagne présidentielle.

Les dates importantes de l’année peuvent être utilisées comme vitrines.

Le travail d’analyse inclut une anticipation des dates clés de l’année qui pourraient être utilisées par les groupes anarchistes pour marquer leur présence publique.

Dans ce contexte, les manifestations étudiantes sont un espace de rattachement opportuniste d’éléments insurrectionnels : plus il y a de monde dans la manif, plus il y a de chance que ces groupes attaquent en toute impunité.

Les analystes informent que les forces policières devraient aussi se préparer cette année à deux 11, celui de septembre qui commémore le coup d’État, et celui de décembre, qui commémorera la mort de Sebastián Oversluij.

Et si l’on doit parler de dates propices au conflit, le 22 mai il pourrait y avoir des désordres pour la commémoration de la mort de Mauricio Morales, et il y aura aussi des actions de solidarité durant le procès en Espagne des chiliens Francisco Solar y Mónica Caballero, de même que pour le procès de  Tamara Farías.

Classification basique des anarchistes

Bien qu’il y ait de nombreuses classifications et sous-classifications anarchistes (subversifs, libertaires, insurrectionnels etc, et des combinaisons de tout cela), le gouvernement de Piñera a classé les anarchistes en trois catégories : Anarchistes tardifs, anarchistes d’origine pure et post-anarchistes.

Anarchistes tardifs : nés à l’époque du gouvernement de Pinochet, ce sont des anciens militants de groupes tel le Mapu-Lautaro, le MIR (et ses variantes) et le FPMR. Leurs apports principaux ont été de renforcer le mouvement à l’intérieur des prisons et de former au prosélytisme subversif.

Les purs : lycéens et étudiants,  un mélange de suiveurs « inarticulés » et d’autres idéologiquement solides.

Post-anarchistes : ça serait une tendance « solidement établie », qui tend vers une radicalisation par rapport à ce qui existe actuellement, rassemblant des jeunes nihilistes et déchaînés et des étudiants.

Chacun de ces groupes peuvent se retrouver dans les neuf phases suivantes :
Anticapitaliste, anti-autoritaire, anti-policier, anti-social, anti-civilisation, anti-carcéral, animaliste, anticlérical et primitiviste ou anarco-primitiviste.

source : La Segunda